par Jean CONTRUCCIIl y a des photographes qui
confondent leur métier avec celui d'entomologistes. Certains sont de simples voyeurs. Quelques-uns, des violeurs.
Serge Mercier ne relève d'aucune de ces catégories.
Certes, ils sait bien, en journaliste, que le mot objectif appartient à l'appareil, pas au photographe.
Et que son regard prime, sinon tous les clichés se ressembleraient.
Mais il sait aussi - par la pratique quotidienne
du reportage -, qu'on peut être subjectif sans danger,si l'on est en même temps sincère et honnête. Il suffit pour cela re respecter son sujet.
Je sais, pour travailler avec lui, que c'est là son éthique.
Pour respecter son sujet, rien de plus simple : il suffit de l'aimer.
Serge Mercier aime l'Afrique et let Africains. Il n'a pas besoin d'employer les grands mots pour le
leur faire savoir. Il le leur dit par la photo, son métier, sa vocation.
Ce ne sont pas de simples photos, c'est un miroir qu'il tend à des amis très chers.
Le coup de foudre lui est venu à l'occasion d'un voyage au Burkina-Faso et en Côte d'Ivoire. Il y retourne à chaque occasion. Il y a établi de solides amitiés, des liens de confiance réciproque. C'est
grâce à eux qu'il a pu saisir les Africains dans leur vérité, toute leur vérité.
Devant Serge, les visages s'éclairent d'un sourire, les mains se tendent désarmées.
Et on l'invite à table, à l'école, au travail, à la fête. On lui présente le petit dernier, l'aïeul, l'oncle, la jeune mariée, la beauté du coin. Tous savent qu'il ne les trahira pas, qu'il ne vendra pas leur âme.
Ne cherchez donc pas le moindre "cliché" dans ces clichés. La moindre concession à l'anecdote.
Encore moins le folklore revu par les camps de vacances où l'on vous promet le dépaysement
à l'abri des climatiseurs, l'aventure du haut d'un hélicoptère. Serge a foulé la poussière, partagé la fatigue, il est entré dans les cases non en terrain conquis, mais parce qu'il y était invité,
il a dormi sur les nattes et partagé les moments de peine, de travail et de joie.
Eux, ont continué à vivre comme s'il n'était pas là. D'où, cette vérité qui est "donnée à voir" sans artifice.
L'Afrique de Serge Mercier ne ressemble pas à celle du papier glacé, des clichés aseptisés des dépliants chers aux Tours operators. Elle sent la pauvreté et la précarité de l'existence, mais aussi
la joie d'exister. Elles parlent de la fraternité, de chaleur humaine. Un regard, un geste, un sourire en disent plus long que les plus savantes études dur le présent, le passé et l'avenir d'un continent
et des hommes qui le peuplent. Privilège du photographe, qui sait transformer chaque instantané en instant d'éternité.