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UN MAGICIEN DES SONGES
Au départ il y avait une recherche d'identité, de racines. Avec ses "sculptures mémoires", Aboudramane s'infiltrait au coeur même de l'Afrique dans
des contrées où interviennent la magie, les rites, le quotidien et l'âme des objets.
Son style fut consacré par deux importantes expositions, l'une au Musée d'art africain de New York, l'autre au centre d'art
contemporain de Vassivière.
Aboudramane aurait pu avoir l'intention de pousser à l'extrême ses lieux habités par une nature secrète, des visions tribales et des parfums entêtants de songes nocturnes. Tout en
prolongeant sa réflexion, il s'en libère, comme de son "africanité" pour plonger au couer même d'une sculpture épurée, tendue à l'extrême, façonnant des objets récupérés d'une chronique de la vie ordinaire.
N'ayaant pas toutefois abandonné ses "maisons" Aboudramane les a orientées vers la représentation de temples païens dans lequel on ne peut que célébrer l'art. Et les sculptures ? Elles s'harmonisent entre
équilibre, transparence et pouvoir des matières. Celles-ci vont du bois au verre, du liège à la corde, du fer à la terre.
Certaines ont la volubilité des bâtons de sorciers, d'autres vibrent d'une pureté
exemplaire, trace rectiligne qui impose au regard des stridences éclatantes. Et lorsque Aboudramane s'abandonne à l'humour, c'est pour nous faire rêve à une volière dont les oiseaux regarderaient le monde avec morgue.
Avec ses sculptures d'une abstraction ludique, il réussit là son passage dans une contrée de l'art qu'il frôlait jusqu'à présent? En guettant simplement l'absolu des formes, les apprivoisant. En magicien des formes.
(Article de Jean-Louis PINTE paru dans Le Figaro du mercredi 8 février 1995. A l'occasion d'une exposition des sculptures d'Aboudramane à la Galerie Maine Durieu, Paris. |
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