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THEMATIQUES

Le colloque est organisé autour de 6 sections :

Section 1 : Histoire d'une esthétique de la communication technologique

Des "parties d'échecs" que l'on jouait, utilisant la première ligne télégraphique installée par Morse (1844), aux "tableaux par téléphone" de Moholy-Nagy (1923), du manifeste La Radia des futuristes (1933), aux manifestes sur le "spatialisme" de Fontana (1946, etc.), l'histoire témoigne que, dès le début, aux technologies de la communication est associée l'idée de leur potentialité esthétique.

Cette section se propose d'établir et de parcourir l'histoire des rapports qui existent entre les technologies de la communication et l'expérimentation esthétique.

 

Section 2

Cette section se propose d'approfondir des questions qui se placent à mi-chemin entre l'esthétique et la philosophie générale. Elle comporte trois axes :

a - Corps, cortex et réseaux

Dans quelle nouvelle situation les réseaux placent-ils le corps ? Favorisent-ils et accélérent-ils cette obsolescence du corps, déjà annoncée par Leroi-Gourhan, ou amplifient-ils sa multi-sensorialité et l'impliquent-ils comme jamais ? Dans le devenir des servomécanismes des réseaux en train de s'affirmer qui, du cortex ou du corps, occupera le premier plan ? Pour ce qui est de l'esprit en activité dans les réseaux, comment est-il appelé et stimulé à penser ? Se branche-il sur le réseau et se laisse-il traverser par lui, ou s'enferme-t-il dans le "cogito" ?

b - Présence à distance

Qu'arrive t-il aux catégories fondamentales du Da Sein (l'être dans le monde) et du Mit Sein (l'être dans le monde avec les autres), en relation avec celles de "proximité" et de "lointain" ? De quelle façon les technologies de la communication à distance nous contraignent-elles à reformuler la catégorie heideggerienne fondamentale du Zuhandenheit (l'essence des choses, qui est celle d'être utilisées par nous) ? Quelle nouvelle phénoménologie de la présence a été introduite par la communication technologique à distance ? Qu'en est-il de la présence à distance dans la connexion entre les réseaux et les dispositifs robotiques ?

c - Forme et événement dans les réseaux

La distinction nietzschéenne entre les arts de la "forme" (l'apollinien) et les arts de "l'événement" (le dionysiaque) est-elle encore valide et pertinente quand il s'agit des productions esthétiques qu'on trouve sur les réseaux ? Les réseaux favorisent-ils une apparition nouvelle de la "forme" ou vont-ils la dissoudre dans le "flux" et dans la temporalité de "l'événement" ? Combien de types de temps passent et s'incarnent à travers les "événements" du réseau ? Existe-t-il une "mise en forme" de "l'événement" de réseau ?

 

Section 3

Cette section se place à mi-chemin entre l'esthétique et la critique au sens propre, et se propose, entre autres, d'analyser les nouvelles pratiques esthétiques qui sont sur le réseau. Elle s'articule autour de deux axes :

a - Thématisation de l'espace-temps comme pratique artistique

À partir de la distinction faite par Lessing entre les "arts de l'espace" et les "arts du temps", la pensée de l'esthétique n'a pas cessé de réfléchir et de s'interroger sur ces catégories fondamentales et sur les rapports qu'elles entretiennent avec les différentes pratiques artistiques. Quelqu'un comme Susanne Langer par exemple, a été conduit à énoncer que la fonction même de certains arts n'est rien d'autre que celle de mettre en œuvre une représentation et un vécu virtuel de l'espace et du temps.

Mais, avec les technologies de la communication à distance, l'espace et le temps, à bien y regarder, repoussent toute fonction de "contenant" et s'éloignent de l'idée de surface ou de support que l'on peut recouvrir de signe, pour s'exposer, avec force, de manière intrinsèque.

Les "artistes de la communication" l'ont perçu les premiers, et ils ont considéré très vite l'espace et le temps comme de nouveaux "matériaux" à thématiser et à esthétiser.

Il s'agira ici d'esquisser une phénoménologie, de souligner des différences, d'indiquer les spécificités de chacun dans le travail d'appropriation esthétique et artistique des nouveaux "matériaux".

b - Jeux vidéos et arts hybrides dans les réseaux

Dans notre monde, à côté du champ de "l'art", dont l'identité est de plus en plus faible, se fait jour un mouvement esthétique, allant se généralisant, qui se traduit par mille comportements et une variété indéfinie de produits hybrides.

Il s'agira, donc, de vérifier comment cette pulsion s'exprime sur le réseau, d'analyser ses productions, de tenter une classification, de formuler un nouveau vocabulaire esthético-critique.

 

Section 4 : Le Net art dans le cadre muséal, les circuits marchands et institutionnels à l'heure de la mondialisation

Le Net art, dans ses meilleurs modèles de production et d'expression, a conquis sa place et une véritable légitimité esthétique. Ces produits de l'esprit requièrent le même type d'attitude esthétique que l'on avait réservé, antérieurement, aux arts. Ceci pose toute une série de questions, auxquelles il nous faut répondre.

Comment faut-il accueillir ces produits dans les lieux institutionnels et consacrés de l'art ? Comment les musées, qui sont déjà en instance de devoir se transformer (musées en réseaux, théâtres virtuels, etc.), vont-ils (peuvent-ils) évoluer ? Faudra-t-il trouver de nouvelles voies ou stratégies de diffusion ? Que devient le droit d'auteur ? À quelles formes de transactions économiques ces produits donneront-ils lieu ? Comment va s'organiser la préservation du Net art (collection, archivage…) ? Le réseau sera-t-il la seule forme de présence de ces produits ? Comment est appelée à intervenir la puissance publique à l'égard de ce type de productions ?

 

Section 5 : Réseaux et futur de l'écriture

Les questions liées à l'écriture électronique ont porté jusqu'à présent sur l'hypertexte, le cheminement non linéaire et non séquentiel. Mais les questions concernant l'écriture en réseau, l'écriture alphabétique en tant que telle, mais supportée par le réseau, semblent se présenter comme bien plus problématiques et profondes.

Quelle est la destinée de l'écriture ? Quelles marges, autrefois existantes, entre la parole et l'écriture, sont-elles éliminées désormais par le réseau ? Quelles attitudes cognitives sont requises par la communication scripturale en réseau ? Et que pensons-nous et qu'écrivons-nous, lorsque notre pensée-écriture-en-réseau est immédiatement transférée à autrui ? Qu'écrivons-nous quand il n'y a plus d'intervalle, que devient le temps de l'attente ? Et qu'écrivons-nous enfin, quand l'écriture est une trace immatérielle et abstraite, qui invite plus à son effacement et sa disparition qu'à son anonyme conservation sur le papier des imprimantes ?

 

Section 6 : Architecture, urbanisme et technologies de la communication

Cette section pose la question de la présence des "artistes de la communication" au-delà des circuits et des milieux à proprement parler artistiques - aux côtés des architectes, des urbanistes, des aménageurs, etc.

"L'esthétique de la communication", dans sa version plus ancienne comme dans celle plus actuelle, donne aux artistes la possibilité de dépasser les micro-circuits et le ghetto de l'art, pour s'insérer, comme à l'époque des Cathédrales, dans le courant de la vie civile et de contrecarrer, en quelque sorte, la perte de sens.

La "domotique", dont les projets et les rares réalisations montrent l'heureuse combinaison entre l'ingénierie, l'architecture et les technologies de la communication, en donne le premier exemple ; elle constitue un embryon de cette nouvelle fonction qui est dévolue, de manière évidente, aux "artistes de la communication" et qui est encore, toute entière, à inventer et à développer.