Sharon DANIEL et Karen O'ROURKE
Bien plus que de simples outils employés pour organiser, élaborer ou conserver des connaissances, les bases de données et les cartes sont des composantes à part entière de notre monde sensible, et de notre sensibilité. Notre perception de l’importance et de la position relative des objets de notre entourage dépend en grande partie de notre contexte socioculturel. La classification et la cartographie impliquent l’interprétation des données de l’expérience à l’aide de systèmes de représentation qui sont culturellement construits. Souvent hiérarchiques, ils exercent une force répressive et normative. Or les techniques de l’information et de la communication numériques offrent un contexte matériel, des outils et des environnements qui pourraient servir à remettre en question ces représentations dominantes et à favoriser d’autres constructions. Ici notre approche est à la fois critique et utopique. Nous tentons de ré-imaginer des systèmes de classification comme des systèmes émergents, où les noms, les catégories et les structures des données associées sont définis à la base par des usages collectifs au lieu d’être imposés d’en haut. Nous employons la cartographie comme métaphore de l’interaction dans la conception de systèmes dynamiques et évolutifs qui permettent à des internautes de créer, d’archiver et d’utiliser leurs propres représentations, à savoir des itinéraires et des cartes. Ces systèmes explorent la dimension esthétique de la base de données. 2 Dans une exposition/atelier qui s’est déroulée en novembre 2002 à l’Université Paris 1, 3 - nous avons présenté et testé des prototypes de ces deux systèmes, Subtract the Sky (Soustraire le ciel) et Une carte plus grande que le territoire. Ici, nous allons exposer la prémisse et la mise en œuvre de nos projets avant d’évoquer les premiers résultats de notre recherche commune. Subtract the Sky (Soustraire le ciel) - Sharon Daniel 4 De la réalisation d’environnements de coopération sophistiqués à grande échelle, utilisant des bases de données, et destinés à des communautés en ligne comme Subtract the Sky jusqu’aux systèmes plus restreints réalisés à l’intention de groupes spécifiques dans leur propre contexte social, l’utilisation et le développement d’outils de collaboration a pris dans ma pratique des formes très différentes. Mes objectifs sont : éviter les intermédiaires qui font écran – au lieu de parler à la place d’autres personnes, je les encourage à parler elles-mêmes – construire des réseaux de coopération qui tentent de résoudre les problèmes spécifiques des communautés qui ont un accès limité à la technologie et à la culture de l’information, et développer des outils de collaboration en ligne qui permettent à ces groupes de s’exprimer. Tandis que le pouvoir politique et économique dépend de plus en plus de la place qu’on occupe au sein de la culture mondiale de l’information, les voix des exclus culturels, économiques et technologiques deviennent de moins en moins audibles. Cette tendance dangereuse pourrait être réversible si des communautés d’intérêt de tout l’éventail socio-économique avaient l’accès à des technologies et la capacité de se positionner dans l’espace de l’information. Subtract the Sky fournit aux individus et aux groupes un environnement en ligne pour des méthodes de cartographie collectives et émergentes. Le titre du projet vient d’une méthode utilisée en astronomie. Les astronomes doivent éliminer la lumière de tous les astres qu’ils ne veulent pas voir afin de capturer celle d’une étoile individuelle. Effectivement l’astronome doit définir ce que signifie "ciel" pour chaque observation. Autrement dit, le mot "ciel " n’a pas de signification unique ; sa définition dépend de la perspective de l’observateur. Lorsqu’on "soustrait le ciel" on interprète des données d’un point de vue subjectif. Nous utilisons cette phrase comme une métaphore poétique et littérale pour désigner le processus qui consiste à recueillir, à créer et à ajouter des données. Subtract the Sky invite les participants à devenir cartographes, dotés des outils dont ils ont besoin pour produire une archive de cartes qui tracent leur propre histoire et resituent leur propre univers social et politique. Nous, les collaborateurs du Subtract the Sky, demandons aux participants de dresser la carte du sujet de leur choix à partir de leur perspective individuelle ou communautaire, mettant ainsi en cause les représentations dominantes ou normatives du monde. Dans ce contexte la définition d’une "carte " est inclusive et comprend aussi bien des plans géographiques qui emploient des données SIG et GPS que des représentations conceptuelles. Les participants vont dresser la carte de leur univers en fabriquant et en classant des données nouvelles (des images, des textes, des sons), en créant des catégories et des associations inédites entre les objets, et en réinterprétant des données existantes, à l’aide d’une visualisation en temps réel de la base de données en évolution de Subtract the Sky. Cette interface elle-même propose une carte de la base de données dans son état actuel, qui exprime de façon dynamique les changements effectués par les collaborateurs à travers le réseau en temps réel. Les participants pourront visionner cette carte selon plusieurs perspectives : à travers le filtre de la classification et de la catégorisation, à travers celui de la relation généalogique entre les contributions (images, textes, sons) ou à travers celui d’un point de vue personnel – à condition d’avoir créé au préalable un ensemble d’associations personnelles. Ils pourront effectuer des recherches dans la base de données (ou sur le Web) par catégorie ou par mot-clef. Ils pourront ajouter des images trouvées dans leurs recherches à une palette qu’ils vont télécharger sur leur propre ordinateur en même temps que l’environnement de création de cartes de Subtract the Sky. Cet environnement multi-utilisateur permettra à des participants de réaliser collectivement des images, des textes et des sons utilisant les données extraites de la base de données et/ou leurs propres fichiers. Les participants pourront ensuite ajouter leurs cartes à la base de données en y créant un nœud où ils placeront leur contribution. Ici ils pourront catégoriser leur carte, la décrire à l’aide de mots-clefs. Le système de classement que nous avons conçu consiste en des termes très contestés comme nature, culture, esthétique, public, privé. Nous espérons que les cartes réalisées et classées sous ces catégories et les mots-clefs utilisés pour les décrire commenceront à infléchir la signification de ces termes et à créer de nouvelles associations entre eux – il s’agit de re-situer le langage grâce à l’apport de multiples voix. L’environnement de création de cartes tracera des relations parent-enfant entre chaque carte fabriquée et les objets-données utilisés pour les réaliser. Cette information est téléchargée en même temps que la carte et les associations sont automatiquement représentées dans la vue généalogique. Tandis que chaque contribution individuelle ou collective est intégrée automatiquement à la carte de la base de données en même temps que les associations triées par la classification et la généalogie – les participants pourront également construire une représentation eux-mêmes, une perspective personnelle de la base de données en éditant et en reconstituant des relations entre les objets-données dans leur visualisation personnelle de la base de données. La dernière phase de Subtract the Sky engagera des projets de recherche technologiques et scientifiques à travers des interfaces interactives sur Internet. Celles-ci donneront au public l’accès à des bases de données astronomiques, génomiques et géologiques. Ces bases seront intégrées à l’environnement de création et à l’archive de cartes fournis dans les phases initiales. Les participants disposeront d’outils pour comprendre, interpréter et visualiser ces données dans leur contexte à l’aide de méthodes spécifiques. Ainsi ils pourront obtenir des résultats utiles à leurs communautés. L’un des objectifs principaux de ce projet depuis le début a été de permettre à l’art et à la science de s’influencer mutuellement, de donner l’occasion à chacun d’infléchir les méthodes et les présupposés propres à l’autre. Les recherches et les visées pédagogiques de l’un des participants, l’astronome Puragra Guhathakurta, jouent un rôle central dans le développement épistémologique et esthétique du projet. Ses travaux utilisant l’observatoire de Keck et le télescope spatial Hubble fourniront les premières informations astronomiques pour la base de données. L’observatoire de Keck illustre cette sorte de complexité située que Subtract the Sky veut engager. Ce projet offre l’outil médiateur de la cartographie pour créer un site d’intervention politique dans les conflits contemporains les plus urgents qui impliquent, par exemple, l’environnement, la science et les droits des peuples indigènes. Le sommet de Keck consiste en ce qu’il est convenu d’appeler la "Réserve de la science ", un terrain de presque six mille hectares qui encercle littéralement le pic de Mauna Kea. Là, sur six cents hectares, se trouvent vingt observatoires. Dans d’autres parties de la réserve, et entre les altitudes de neuf mille et de treize mille pieds autour de Mauna Kea, on trouve plus de quatre mille sanctuaires sacrés pour les familles indigènes hawaïennes. A la fin des années soixante, l’Université d’Hawaï et le Bureau de l’Aménagement Territorial de l’État ont signé un bail de soixante-cinq ans, qui stipulait qu’ils devaient maintenir l’intégrité environnementale et culturelle de ce sommet et qu’ils avaient le droit de construire un maximum de huit observatoires. L’an dernier, les députés de l’état de Hawaï ont ordonné un audit de leurs pratiques administratives. Le rapport était accablant. La réponse à l’audit a été de défier les autorités en agrandissant le nombre d’observatoires de vingt à un total de cinquante-quatre. Les auditions publiques ont provoqué l’indignation complète. Des représentants du mouvement pour l’autonomie des indigènes, des scientifiques, des environnementalistes, des avocats, des résidents non-indigènes, parfois même des employés de l’observatoire ont protesté ensemble. Des questions concernant la science (occidentale et indigène), les droits à la terre, l’environnement, la religion, la politique, l’économie entrent toutes en collision ici. 5 Subtract the Sky veut faire entendre ce type de complexité. Il vise à être interventionniste, mais à partir d’un point de vue "multi-axial " à strates multiples. Par exemple toutes les parties en cause dans la controverse sur l’élargissement des observatoires à Mauna Kea seront invités à participer comme cartographes. Tandis que les données GPS et SIG ont déjà été employées dans la présentation et la défense du nouveau plan, ce qui témoigne du pouvoir et de l’acceptation de la cartographie comme outil politique, Subtract the Sky fournira un cadre pour que chaque perspective puisse être représentée sur une carte : depuis le point de vue des familles dont les sanctuaires co-existent avec les antennes paraboliques du "Baseline Array " jusqu’à celui des utilisateurs scientifiques, en passant par des environnementalistes, des hommes politiques, des "snowboarders " et des écoliers. Subtract the Sky est un outil. Il a été conçu pour faire entendre la voix des communautés et des individus qui s’expriment sur des problèmes en rapport avec leurs univers sociaux. Il sera ouvert à tout internaute qui souhaite l’utiliser, mais servira aussi, dans des contextes spécifiques, d’outil destiné aux électorats qui n’ont pas normalement accès à des technologies de la communication et dont les voix ne sont pas entendues dans l’espace de l’information. J’ai l’intention d’employer Subtract the Sky comme instrument pour recueillir les perspectives des prisonnières, leurs familles et leurs communautés dans un projet intitulé justvoice/justice now, que je mène en collaboration avec une association à but non-lucratif qui défend les droits des femmes en prison. Nous demandons aux personnes les plus affectées par l’industrie carcérale de nous confier des images, des entretiens, et des propositions pour construire un monde sans prison. Les représentations médiatiques dressent continuellement et activement la carte d’un terrain géopolitique complexe qui, au lieu de constituer un absolu monolithique qui "va de soi ", doit être réexaminé de plusieurs points de vue. Pour dresser la carte de ces univers il ne faudrait pas se contenter des "informations disponibles ". Des données peuvent être classées et reclassées selon de multiples perspectives. Le champ des données doit être ouvert à des additions et à des reconfigurations venant de toutes les perspectives en présence, sans ordre hiérarchique ni restrictions. Une carte donne toujours un point de vue. Elle situe, mais elle est elle-même déjà située. Les cartes sont des instruments politiques qui devraient être conçus et employés aussi bien par des coopératives et des réseaux de base que par les gouvernements et des pouvoirs publics. Des réseaux de base, des organismes à but non-lucratif, des groupes exclus du pouvoir ont besoin d’un contexte, d’un accès au champ des données et aux outils pour mener une action politique dans le domaine de l’image, afin de pouvoir développer des méthodes collectives et émergentes qui leur serviraient à dresser des cartes et à visualiser des données : c’est là la prémisse de Subtract the Sky.
Une carte plus grande que le territoire - Karen O'Rourke "C´est une autre chose que nous avons apprise de votre Nation," dit Mein Herr, "la cartographie. Mais nous l´avons menée beaucoup plus loin que vous. Selon vous, à quelle échelle une carte détaillée est-elle réellement utile ?" Les aborigènes australiens trouvent leur chemin dans des déserts lointains sans recourir à des instruments de navigation ni à des notions d’astronomie. Ils se construisent des cartes mentales à l'aide de mythes, de récits et de chants traditionnels, qui évoquent à grands traits les pistes et les sites établis par leurs aïeux dans un passé indéfini. Mais leurs connaissances géographiques extrêmement précises sont basées avant tout sur des conversations avec des compatriotes rencontrés en route, où chacun se plaît à décrire avec un luxe de détails les chemins, les repères, les points d'eau, les lieux sacrés : ceux qu'il a vus de ses yeux, ceux dont il a entendu parler. 7 Loin en apparence des flâneries d'un Baudelaire, des errances expérimentales d'un Breton, nos trajets à nous pourraient paraître bien balisés, circonscrits dans un quotidien qui semble exclure toute découverte, toute rencontre fortuite. Sur le quai du métro à l’heure d'affluence n’avons-nous pas parfois l’impression de retrouver les mêmes têtes ? Elles pourraient nous servir de repères : au moins nous ne nous sommes pas trompés de quai. En demandant aux participants de raconter leurs chemins à travers la ville, Une carte plus grande que le territoire vise à reconstituer nos schémas partagés, à l’aide de notions telles que le repère, le quartier, le bord, le chemin, le rendez-vous. Quelles caractéristiques des lieux ou des routes nous aident à nous orienter ? Quels détails nous révèlent un carrefour, une rue, un quartier ? En quoi consistent nos cartes mentales ? En quoi sont-elles spécifiquement parisiennes, new-yorkaises, berlinoises ? L’expérience du déplacement spatial est inséparable de celle du temps. Comme le fond d’un dessin figuratif (dans le couple figure/fond), ce temps des transports que l’on dit parfois "perdu", ce temps "en creux" façonne celui qu’on met en avant, "en relief". Même en cas d’urgence nous ne choisissons pas toujours le chemin le plus court. Pourquoi certains jours nous attardons-nous à une table de café, alors que d’autres fois nous pressons le pas même si nous avons "tout notre temps" ? Et puis que reste-t-il de nos voyages ? Un souvenir, un objet, une épiphanie ? Nos itinéraires reflètent non seulement nos choix personnels mais aussi notre contexte culturel et politique. Nous pourrions parcourir les cent kilomètres qui séparent Jénine et Hebron en deux heures ou en quatorze, à condition de ne pas nous trouver bloqués en chemin à l’un des 24 points de contrôle de l’armée israélienne. 8 Quoi qu’il en soit, nos vicissitudes de voyage fournissent des indices précieuses sur les conditions de vie dans un lieu et à un moment donnés. Guy Debord définit la dérive comme "une technique du passage hâtif à travers des ambiances variées. Le concept de dérive est indissolublement lié à la reconnaissance d'effets de nature psychogéographique et à l'affirmation d'un comportement ludique-constructif, ce qui l'oppose en tous points aux notions classiques de voyage et de promenade." 9 La géographie "rend compte de l'action déterminante de forces naturelles générales, comme la composition des sols ou les régimes climatiques, sur les formations économiques d'une société et, par là, sur la conception qu'elle peut se faire du monde. La psychogéographie se proposerait l'étude des lois exactes et des effets précis du milieu géographique, consciemment aménagé ou non, agissant directement sur le comportement affectif des individus." 10 Les situationnistes cherchaient à déceler des messages subliminaux dans l’aménagement des villes. Pour eux la psychogéographie était une sorte de "cut-up " de l'espace urbain. 11 Une carte plus grande que le territoire développe une application Web qui permettra aux participants de représenter en ligne leurs itinéraires en utilisant des images, des textes et des sons. Le résultat sera une sorte de "Carte du Tendre " dressée à l’aide de la technologie de surveillance. Chaque voyage peut être analysé, raconté ou mis en images. Le chemin à pied pour aller à l’école évoquera, par exemple, le parcours des Tristes Tropiques, une sortie au magasin le Printemps au moment des soldes pourrait devenir une périple digne d’Alexandra David Neel… A terme ce projet comportera : 1. un système de notation qui permet de retracer un parcours urbain et de le visualiser en ligne. 4. une braderie en ligne d’itinéraires d’occasion, où des utilisateurs pourront visualiser, télécharger, acheter, vendre ou échanger des parcours. Ce projet vise à réunir, voire à confronter, dans une même base de données des parcours en apparence très différents, itinéraires d’adultes qui circulent en voiture et d’enfants qui prennent leurs jambes à leur cou, trajets quotidiens et flâneries sans but, sauts de puce dans le quartier et voyages au bout du monde, virées au centre-ville et embouteillages interminables sur le périphérique, tous susceptibles de nous révéler des aspects insoupçonnés de notre imaginaire urbain. Les détails de nos parcours subjectifs qui, pris isolément, pourraient paraître triviaux ou anecdotiques, deviennent significatifs lorsqu’ils sont confrontés à d’autres, à beaucoup d’autres. En conjonction avec un très grand nombre de détails, d’histoires uniques et de trajets ordinaires, ils forment une nouvelle entité, un tout qui est plus grand, plus intelligent que la somme de ses parties. Avec son marché d’itinéraires et son réseau de liens, la Carte tend un miroir à la Ville. Plus l’une, comme l’autre, favorisera la diversité, plus elle sera vivante. Versatile et polymorphe, elle est produite par l'ensemble des interactions locales entre les habitants et leurs espaces de vie. 13 Agissant individuellement, interagissant avec d’autres au niveau local, ils provoquent des comportements collectifs au niveau supérieur. La Carte, comme la ville, constitue un système complexe organisé, tissé de multiples "situations dans lesquelles une demi-douzaine ou même plusieurs douzaines de quantités varient simultanément de manière à former des interconnexions subtiles". 14 Plutôt que de créer un objet de contemplation, 15 ce projet met l’accent sur les interconnexions, les manières dont ces réseaux fonctionnent.
Peut-on dresser une carte de la base de données ? "L'espace et le temps sont des structures quantitatives dynamiques : quand un corps se déplace, quand une force agit, ils influent sur la courbure de l'espace-temps et à son tour la courbure de l'espace-temps influe sur la façon dont les corps se déplacent et les forces agissent. " Steven Hawking 16 L’exposition /atelier à l’Université Paris 1 a accéléré le développement des deux projets. Les artistes, les programmeurs et les participants ont travaillé ensemble dans l’espace de la galerie. Nous avons commencé par présenter les projets à des groupes invités et à des visiteurs individuels. L’exposition, à la fois espace de présentation et atelier de réalisation, a permis au public de consulter les auteurs et les développeurs, d’explorer les sites Web et de contribuer aux bases de données en réalisant une carte ou en répondant à un questionnaire. Par la même occasion les participants ont pu nous communiquer leurs impressions, leurs attentes et leurs critiques. Il est essentiel, lorsqu’on construit un projet basé sur la participation du public, de pouvoir tester le dispositif auprès de "vrais" utilisateurs. Les discussions avec les membres de la communauté universitaire ont éclairé les perspectives interculturelles qui sous-tendaient l’atelier : en effet les participants étaient français et américains, étudiants et professeurs, artistes et informaticiens. Le fait de présenter les deux projets dans le même espace a permis de mesurer leurs différences et d’amorcer une réflexion sur les questions suivantes :
Notes 1 - Cette recherche a reçu le soutien du Fonds France-Berkeley. 2 - Sur ce sujet voir AI and Society, numéro spécial "Database Aesthetics: Issues of Organization and Category in Online Art," Springer-Verlag, 2000. 3 - B. Chatwin, The Songlines, Jonathan Cope, London 1987. UFR des Arts Plastiques et des Sciences de L’Art, Fontenay-aux-Roses. 4 - Ce projet est réalisé en collaboration avec Mark Bartlett, avec l’aide de John Jacobs, Olga Trusova, Adam Hyatt et Victor Dods, avec le soutien de la Fondation Langlois et le Banff Center for the Arts. 5 - Mark Bartlett a mené des recherches sur cette situation à l’observatoire de Keck. Le paragraphe qui suit a été rédigé en collaboration avec lui. 6 - Sylvie and Bruno concluded (Londres, 1893), trad. Gilles Palsky, "Borges, Carroll et la carte au 1/1 ", <http://193.55.107.3/cartogrf/texte1/jborges.htm> 7 - David Turnbull, Maps are Territories, Chicago, University of Chicago Press, 1989, 1993 8 - Akiva Eldar, "Checkpoints in the territories - and Jerusalem" in Ha'aretz, Thursday, February 21, 2002 / Adar 9, 5762 9 - Guy Debord, "Théorie de la dérive" in Les Lèvres Nues, N° 9, déc. 1956 et L'Internationale Situationniste , N° 2, déc. 1958. 10 - Guy Debord, "Introduction à une critique de la géographie urbaine " in Les Lèvres Nues, N°6, Bruxelles, 1955 11 - Ils ont développé des techniques spécifiques de distanciation comme celle qui consiste à circuler dans Paris, par exemple, à l'aide d'un plan de Londres. Aujourd'hui les membres du groupe "Social Fiction" soumettent leurs parcours à l'arbitraire d'algorithmes dérivés du "Jeu de la Vie" de Conway : "La psychogéographie générative, des promenades à pied suivant une route dictée par un algorithme, a été développée afin de mettre à l'épreuve le postulat qui veut qu'une fois qu'on commence à utiliser la ville autrement, on s'ouvre à la possibilité d'une myriade d'autre découvertes." Wilfried Hou Je Bek, "Flaneur Culture" <www.socialfiction.org/psychogeography>. 12 - L’objectif est d’élaborer avec les participants une poétique du questionnaire, envisagé ici comme une forme symbolique. 13 - Bien entendu, les pouvoirs publics modifient ces comportements à travers les plans d’aménagement urbain, les lois et les ordonnances réglant l’utilisation de ces espaces ; mais comme le montre Jane Jacobs, leurs efforts ne produisent pas toujours les effets recherchés. Jane Jacobs, The Death and Life of Great American Cities, New York, Random House, 1961. 14 - Warren Weaver, "Science and Complexity", in Annual Report of the Rockefeller Foundation, 1958, cité par Jane Jacobs, ibid., p.433. 15 - En effet, une base de données, comme un immeuble, pourrait être appréciée pour sa structure, indépendamment de son usage. 16 - cité par Martin Dodge et Rob Kitchen in Mapping Cyberspace, London, Routledge, 2000
© Sharon DANIEL et Karen O'ROURKE & Leonardo/Olats, mars 2003 |