Samuel BIANCHINI
Ce sont en premier lieu nos relations affectives et actives aux images qui sont bouleversées et méritent que l'on y porte toute notre attention. En tant que créateur, on ne peut plus être dans le projet et l'attente de la participation volontariste de l'autre. Une recherche pratique sur les motivations du désir d'image s'impose, et, plus précisément, du désir d'animer l'image. En retour, face à l'image, qu'est-ce qui nous anime ? Quels pourraient être les embrayeurs de passage à l'acte ? Comment s'articulent des modèles de participations affectives 1 avec des modèles de participations "effectives" 2 ? Quels sens et quels états naissent à la croisée de ces différents mouvements participatifs ? Comment associer pulsion motrice et réflexivité, ou, pour le dire autrement, prise de conscience par l'expérience de l'image ? Fort de ces recherches, nous pouvons envisager leur "implant" dans une situation plus complexe et collective, celle des réseaux électroniques et plus largement des réalités médiatiques. L'image interactive se déploie, elle est alors image partagée ou image distribuée. Ces images deviennent un des instruments privilégiés de l'interopérabilité de nos réalités physiques et des médias interactifs. Elles sont le vecteur principal d'un conditionnement réciproque qui se réalise à travers toutes les formes de manipulation. Puisque l'interactivité est le plus souvent signe de situations réversibles, être en mesure de penser, de proposer et d'investir ces images est aujourd'hui une nécessité politique pour éviter leur instrumentalisation au profit d'un asservissement à sens unique.
Le théâtre des opérations 3 À propos des travaux de la série des Dispn, dispositifs d'image interactive sur le web et installations 4 : Sniper [1999], Ta garde [2000], D'autant qu'à plusieurs [2001] C'est toujours seul, face à l'image, que se jouent les Dispn. Pour leur pleine réalisation, le spectateur y tient le rôle principal : c'est lui qui, par ses gestes, anime les images dont il fait l'expérience. La représentation est ici donnée avant tout comme un exercice de conscience. Sniper nous place face aux images d'une séquence vidéo des quelques secondes de la chute d'une femme abattue par un Sniper. Ces quelques images sont extraites du film auquel ce travail fait écho : Warshots du réalisateur allemand Heiner Stadler. Chacune de ces images est découpée en vingt-cinq parties. À chaque fois que le spectateur survole l'une de celles-ci, il révèle la partie correspondante de l'image suivante. L'écran se compose alors de fragments de différentes images mettant sur un même plan des temps différents de la chute. Cette "profondeur de temps" devient l'objet de "la manipulation du spectateur". En position parallèle à celle du sniper, il se voit progressivement responsabilisé de la situation et prend toute la mesure de ses gestes. Avec le dispositif Ta garde, deux boxeurs se battent par images interposées. Côte à côte, celles-ci affichent un fond identique, dupliqué : une vue fixe sur le ring. Chacun des boxeurs progresse dans une de ces images. L'un évolue subrepticement dès que le spectateur survole l'autre par un mouvement de souris. Le curseur sur la droite de l'écran provoque une action du boxeur à gauche, puis c'est l'inverse. Cette mécanique une fois comprise reste pourtant contrariante : en déphasant geste et regard, elle n'est pas ergonomique. Droite, gauche, accélérer, peut-être est-ce une solution ? Chacun, tour à tour, est en action, le spectateur aussi. Un combat à trois se profile. L'injonction initiale, Ta garde, à l'adresse d'un boxeur, puis de l'autre, se retourne progressivement : elle est tout autant destinée à cette "tierce personne", le spectateur. Mobilisé par le désir de rapprocher dans l'espace et dans le temps les deux protagonistes, de les synchroniser, le spectateur est pris dans une situation qui conditionne son geste. Mais, comme dans toute cette série de dispositifs, il est loin d'être plongé dans un environnement crédible ; le jeu de sa mise à l'épreuve n'est ici qu'entraînement à l'exercice de sa conscience. D'autant qu'à plusieurs met en œuvre l'image de deux personnes assises l'une derrière l'autre sur un gradin. Tel un motif de papier peint, cette image est répétée, formant une foule. L'image est petite et ses couleurs sont un peu passées, il semble difficile de la dater, de la situer ou d'identifier l'un ou l'autre de ses figurants. Est-ce un document historique ? D'actualité ? De meeting politique ? D'événement sportif ? D'abord fixe, l'image de foule s'anime au passage du curseur sur chacun de ses motifs : le premier personnage en arrière plan se met à applaudir. Puis, devant, le second se lève, s'agite et dresse vivement un bras. Le spectateur s'anime à son tour. Plus il déplace la souris et plus il fait réagir l'image, motif après motif, créant un mouvement de foule qui suit le mouvement de la souris : il forme une sorte de "ola" ou, selon l'interprétation, un "salut collectif et ordonné". Si dans un premier temps la découverte ludique du procédé mobilise nos gestes et nous conduit à les organiser pour animer cette foule, assez rapidement ces mêmes gestes acquièrent une épaisseur, un sens qui nous prend à partie. L'ambivalence de ce mouvement de foule qui motive et intègre notre action nous interroge sur les pulsions qui traversent une situation collective et auxquelles il n'est pas toujours facile de résister. Mais, autant la situation est jouée, représentée, autant notre rôle y est central et fortement individualisé. Tout questionnement est ici à prendre à notre propre compte et non délayé dans une quelconque déresponsabilisation collective. Si ces dispositifs provoquent des situations dans lesquelles le spectateur se voit progressivement responsabilisé en couplant son geste au désir de son regard, toute volonté de faire croire, ou plus encore, "d'immerger", est pourtant à révoquer. Les montages dans l'image, facteurs de manipulation, sont à ce titre parfaitement visibles. Au contraire, c'est un retour à soi qui est privilégié. Au jeu de prise en main de l'image par le spectateur succède un second niveau de lecture dans lequel nos faits et gestes sont à reconsidérer dans le dispositif qu'ils occupent. Ce dernier s'affirme et se donne à comprendre comme lieu de négociation avec l'image, cette place dans laquelle on opère et par laquelle l'emprise sur l'image peut se conjuguer avec une prise de conscience. C'est bien d'opérations, physiques et intellectuelles, dont il s'agit avant tout. Ces propositions militent pour que le vaste théâtre des opérations, nos réalités, nous appartiennent et se substituent en tant que telles à l'idée résignée d'une représentation déjà donnée et toujours subie.
L'image désirante À l'instar des travaux de la série des Dispn, le dispositif conditionne les gestes qui viennent animer l'image. De part et d'autre de celle-ci sont mises en œuvre des stratégies de "manipulation" : prévoir pour que l'autre, le spectateur, s'active, actualise et manipule à son tour l'image. Pour mobiliser ce dernier, quelques hypothèses sont envisagées, des motivations affectives profondes pouvant se prêter au jeu des relations avec l'image. Ainsi nos désirs de complétude, d'animation ou encore de synchronisation s'affirment dans nos relations actives à des dispositifs d'image tels que les Dispn. C'est bien de désir dont il s'agit avant tout. Comment l'image se fait-elle "désirante" au point de provoquer le passage à l'acte ? Certes, en premier lieu le dispositif physique (souris, etc.) appelle déjà un acte ; la disposition des différents éléments d'une image composite également (puzzle, etc.). Et l'image elle-même peut laisser entrevoir son désir de désir, sa désirance, lorsqu'elle est en attente, qu'elle dispose d'"une puissance d'évocation motrice (une image [qui] mobilise en nous des ébauches de conduite motrice)" 5. Une image prise (arrêtée) en cours marque, par exemple, un potentiel de mouvement, pour elle-même et pour le geste. Du dispositif à l'image même, créer l'indice d'un potentiel ou d'un manque, que ce soit de mouvement, de rythme, …, d'adéquation entre ses composants constitue un embrayeur indéniable. L'indice est alors suffisant pour nous faire "constater, regretter une absence" 6 que l'on pourrait peut-être compenser activement. 7 Présenter une absence, c'est finalement le propre de toute représentation. En même temps qu'une absence relayée par un système de signes, c'est une absence de relations possibles dans l'image et plus largement d'activités dans et avec l'image qui est rendue perceptible. Comme si l'image était désœuvrée. En jouant sur les deux registres de la relation à l'image d'une part et d'un système de signes qui composent l'image d'autre part, établir un rapport actif à l'image revient à nouer un rapport avec son système relationnel (de signes) actif et réactif (programmé). Sous le régime du signe, entre substitut (idole) et représentant affirmé en tant que tel (icône) un jeu s'installe. L'attitude varie lors de la pratique de l'image interactive : on instaure avec elle un rapport actif comme pour combler une déficience de réalité, et, en même temps, pour se rassurer sur un statut sans conséquence 8 qui autorise toutes nos manipulations. Pris dans cette ambivalence, à mesure que l'on s'essaie à différentes distances, c'est la situation d'image qui s'affirme et prend part à notre réalité. S'immiscer, insérer notre activité dans les relations internes de l'image pour l'animer participe de cette situation. Animer l'image nous anime en même temps. Faire coïncider notre état et celui de l'image crée un état d'ensemble dans le présent (un temps réel), affirme une situation de coprésence, c'est-à-dire aussi et surtout assure notre présence à nous-mêmes. Notre puissance se mesure à l'image à travers l'expérience que nous en faisons. Loin de "ça a été" 9, l'image interactive est la preuve conjointe d'un temps présent, "c'est", et d'un temps possible, "ça pourrait être", d'un actuel (plaisir) contre un potentiel (déplaisir), d'un état au détriment des autres. Elle partage et actualise sa virtualité, sa mise en puissance avec celle de son spectateur. Moteurs du désir, puissance et absence s'appellent, s'alimentent et se produisent mutuellement à travers ces images. Nous sommes loin des participations affectives du spectateur de cinéma "enchaîné" à la fiction et plongé dans le noir comme dans son fauteuil. Ce dispositif cinématographique qui faisait adopter la devise du ver à soie à Roland Barthes : "Inclusum labor illustrat ; c'est parce que je suis enfermé que je travaille et brille de tout mon désir" 10. Le spectateur est aujourd'hui utilisateur. Il se mobilise pour activer l'image, pour la réaliser. Le jeu des désirs face à l'image est totalement renouvelé. Au cinéma, le déploiement des processus de participations affectives fait de l'inhibition du corps son moteur : en l'absence de participation physique, le spectateur compense par une participation affective intense. Aujourd'hui, l'animation de l'image est nécessairement couplée à l'animation physique du spectateur. S'animer en même temps, se confondre un instant dans un échange d'effets et d'affects avec l'image. Ce va-et-vient, cet aller-retour dans l'image, aussi élémentaire qu'érotique, en constitue l'expérience première. Dans ces relations actives à l'image, il semblerait que le schéma traditionnel de la progression cinématographique, "situation-action", se conjugue avec celui de "déplaisir-plaisir". Dans ces conditions, nouer une relation à l'image participe de ce carrefour animé, ce petit théâtre d'opérations où s'entrecroisent pulsions motrices, affects et effets, où se motivent réciproquement geste et image. Les premières formes de "désirance" de l'image évoquées ici relèvent du domaine de l'érotisme : compléter, synchroniser, animer. La mise en rapport se fait dans les jeux de l'attachement-détachement, de la continuité-discontinuité, de l'épreuve des forces contradictoires de notre obsession de fusion (perdue) et de notre volonté d'affirmation individuelle, signe de notre indépendance, de notre discontinuité 11. Ces formes relationnelles sont en premier lieu temporelles : elles nous rappellent que "certaines structures psychiques spécifiques [qui] fondent l'image comme un lieu possible de transformation, de soi ou du monde […] sont organisées d'abord par les rythmes, qui sont le premier mode d'appropriation de l'expérience perceptive. 12" S'il s'agit de forme du temps, nous ne sommes pourtant pas dans le déroulement, dans l'enchaînement d'"images-mouvement", mais bien davantage face à des "images-temps" 13 : nous faisons du "sur place". Il n'y a pas de flèche du temps, pas de fin. L'image en est d'autant plus désirante qu'elle provoque dans sa variabilité un désir toujours à accomplir, jamais achevé. Les figures de référence sont la boucle et la "combinatoire" ; elles relancent sans cesse nos désirs. Ces formes de temps sur place, à défaut de se dérouler, se développent dans un autre sens, elles en appellent à "l'une des catégories formelles les plus importantes de la modernité : celle de l'échelonnement des phénomènes. Il s'agit d'une forme du temps, beaucoup moins connue que le rythme, mais présente dans un nombre si grand de productions humaines qu'il ne serait pas trop d'un néologisme pour le désigner : appelons ce "décrochage", […] une "bathmologie". La bathmologie, ce serait le champ des discours soumis à un jeu de degrés. 14" Plutôt que l'image ne passe devant nous ou que l'on passe devant elle, c'est maintenant une épaisseur de temps 15, dans le temps qu'il faut investir et qui se découvre et s'étage à travers l'expérience qu'on en fait. Après la pulsion motrice première, celle qui fait embrayeur, la relation se construit. "On pourrait dire [que] ce qui a commencé comme acting finit comme acte. (Nous distinguerons ainsi deux grands types de décharges motrices, celle qui échappe à l'épreuve de la réalité et celle qui demeure sous son contrôle.)" 16 Dans un second temps vient en effet le désir de contrôle, de maîtrise de la situation. (Re)prendre la main, c'est alors s'assurer d'une concordance entre son geste et ses effets, s'assurer de soi-même, se rassurer en somme. Et pour cela on s'entraîne à l'image comme on s'entraîne à un sport ou à un jeu (vidéo) mais pas comme on se laisse entraîner au cinéma. Ces gammes produites et maîtrisées sont des acquis pour prolonger l'expérience de l'image 17 : on tente alors d'en découvrir son sens et, à défaut, on lui en attribue. Ambiguïté ou ambivalence jouent ici à plein régime. À mesure qu'on donne du sens à l'image, notre geste en retour peut également s'en charger. "Comprendre" l'image, la "saisir" 18, participe bien, selon la double acception de ces termes, à la fois d'un mouvement physique premier de désir d'enveloppement 19 (de l'image et / ou par l'image) et d'un processus intellectuel. "La possibilité pour le spectateur de comprendre lui procure à la fois un gain narcissique (il a compris !) 20 et un plaisir d'appartenance (il fait partie de ceux qui ont compris !)". Mais lorsqu'il n'y a pas de message, que l'image est instable, variable, qu'il n'y a pas d'état sur lequel se fixer, le désir de saisir est relancé, sous le biais du sens cette fois. Il est d'une part renvoyé à l'expérience, à l'engagement dans l'image, et, d'autre part, dans un mouvement de recul, de distanciation, à ce qui donne la représentation, la rend possible : l'activité (le geste) et le dispositif. 21 Prendre la mesure de ces actes, c'est alors également comprendre. Le va-et-vient s'apparente aussi à un exercice de conscience. 22 Relancer, boucler : il n'y a pas de bout, pas de fin, pas de dérivatif. L'activité physique est une voie de décharge, de sublimation. 23 Ici, l'image est désirable pour elle-même et non, comme dans la publicité, pour un tiers objet qui comblera l'absence. L'image se consomme sans se consumer, pour elle-même mais surtout pour nous-même. On peut l'abandonner lorsqu'on en a fait le tour, lorsqu'on en a acquis l'expérience.
En prise avec les réalités médiatiques Si la mise en œuvre d'un art expérimentable est engagée sur le terrain de l'exercice de conscience, nécessairement individuel, elle n'est pas pour autant retranchement, voire désengagement ; elle est au contraire préparation. Certes, l'œuvre peut se jouer en "local", mais aujourd'hui la manipulation des images est de plus en plus indexée sur une réalité, une réalité qu'elle coproduit, une réalité médiatique. Entreprendre celle-ci comme théâtre des opérations, c'est souligner la mise en scène de notre réalité quotidienne qui associe représentation et activité physique. Le conditionnement réciproque de ces termes appelle un rapport de forces permanent qui installe des zones intermédiaires d'échange, de négociation ou de confrontation. Ce sont dans ces champs d'activités, zones tampons ou lignes de front, que se règle, se forme et se déforme, s'accomplit, une part de plus en plus importante de ce que nous considérons comme notre réalité. Cette réalité médiatique, en nous reliant les uns aux autres par toutes sortes de réseaux, se voit reconnue par son partage et sa distribution. Loin d'être homogène, elle se cherche et cherche sa place, elle est plurielle 24 : réalité virtuelle, réalité augmentée, "real reality" 25, les qualificatifs ne manquent pas pour essayer de s'y repérer et prendre la mesure de ses développements. L'image interactive tient ici un rôle de premier plan, elle est l'interface, à la fois adaptée aux modalités analogiques de la réalité physique et à celles du calcul numérique. Elle incarne bien souvent cette zone intermédiaire, elle traduit une activité dans l'autre, les indexe l'une sur l'autre pour permettre leur interopérabilité. Partagées, distribuées, ces images, théâtres et vecteurs d'activités collectives, s'interposent entre les individus et médiatisent leurs activités mutuelles. Les micro-scènes locales s'interconnectent et se répercutent les unes sur les autres. Dans ce théâtre des opérations distribué, l'image se joue à plusieurs. Sans remettre fondamentalement en question les jeux du désir solitaire, ces nouvelles dispositions les complexifient. En devenant effectives pour d'autres, nos actions sur l'image ne sont plus sans conséquence, la "boucle locale" n'a plus lieu de la même manière. Ce qui fait retour, c'est alors ce qui signe l'activité de l'autre, sa présence à l'image. Cette fois, ce n'est plus seulement avec l'image programmée qu'il faut tenter de composer, mais avec l'autre par l'intermédiaire de l'image qui est aussi son image. Stratège, l'autre fait résistance. Apparaît inévitablement une nécessité de s'organiser, passer des accords explicites ou tacites, directs ou différés. Régler nos dispositifs communs et leurs usages provoque des questions de "micropolitique" qui peuvent renouveler le genre. 26 Déjà pour le cinéma Christian Metz notait que "l'économie libidinale (plaisir filmique sous sa forme historiquement constituée) manifeste […] sa "correspondance" avec l'économie politique (le cinéma actuel comme entreprise de marché)." 27 Aucun doute sur l'actualité de ces propos. Cependant, l'économie libidinale des images interactives est très différente de celle du cinéma. La célèbre formule d'André Bazin, "Le cinéma substitue à notre regard un monde qui s'accorde à nos désirs", doit être redéfinie. En privé et encore plus en public (collectivement), la nécessité de "s'accorder" avec l'image ouvre un espace de négociation et de manipulation qui est loin d'être exempt des jeux du désir. Cet espace offre une alternative au schéma communicationnel classique qui inclut trop souvent un pôle de réception toujours plus soumis et résigné. Cette résignation nous entraîne insidieusement à "adopter" des "objets temporels industriels" 28, à nous adapter à leur "flux", à leur "calendarité". Cette attitude, si bien stigmatisée par Bernard Stiegler 29, signe le risque "d'une débandade mondiale", d'une liquidation de l'"économie libidinale", c'est-à-dire de nous faire sombrer dans le "mal-être". Si, pour ce dernier, la "téléaction […] poursuivra, complexifiera et améliorera très sensiblement les performances de la temporalisation industrielle des consciences" 30, nous pensons pourtant qu'il y a du "jeu" dans de nombreuses zones tampons, des "zones sensibles" à investir par l'action et la création, à opérer.
Notes
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