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Masque, mimétisme, et métamorphose / monde animalier


Masque et simulacre, masque et mimétisme paraissent indissociables. Parmi les diverses fonctions du masque, fonctions placées communément sous le signe de la métamorphose, il en est une particulièrement frappante et énigmatique : celle qui confère au masque le pouvoir de dépasser et transformer les apparences, et de permettre à celui qui le porte de nier les limites corporelles, et d'agir et sentir comme s'il n'y avait plus de barrières entre lui et le milieu naturel environnant. Le masque, attribut essentiel du mime, s'empare momentanément du visage humain et suspend momentanément son système de signes, pour détourner la communication vers d'autres fins. Le microcosme bien ordonné que forme chaque partie du visage (les yeux, la bouche, le nez) fait alors place à l'univers du masque où le désordre, l'incongru et la fantaisie deviennent maîtres.

Le masque africain est précisément un objet dans lequel s'incarne le désir humain de transgresser les frontières entre l'homme et la nature, et celui peut-être de réintégrer l'espace naturel.

Les exemples qui suivent montrent à quel point l'homme et l'animal, et notamment les insectes et reptiles, recourent volontiers aux stratégies du mimétisme, au déguisement des apparences. " L'inexplicable mimétisme des insectes », observe Roger Caillois, " fournit soudain une extraordinaire réplique au goût de l'homme de se déguiser, de se travestir, de porter un masque, de jouer un personnage. » Mais à la diffèrence du masque humain, le masque arboré par un papillon ou un caméleon n'est pas un accessoire, il fait partie du corps de l'animal.

1/- Masques composites, à la fois homme et animal :

Les masques composites à traits humains et animaliers expriment merveilleusement bien le désir de l'homme de passer au delà de l'univers humain et son besoin quasi-impulsif d'user du mimétisme. Ils montrent aussi qu'en Afrique la ligne de démarcation entre l'humain et l'animal est parfois floue. Qu'il s'agisse de totémisme, de magie et de sacrifices d'animaux, toutes ces coutumes traduisent l'interpénétration des mondes humains et animaliers. Les combinaisons d'hybridation sont variées et font preuve d'une inventivité, et d'une liberté dans l'agencement des formes, couleurs et matériaux, qui paraissent infinie. Un bestiaire étrange et fantastique s'élabore dont on retrouve l'alchimie dans les contes africains et qui rappelle que l'homme, quelle que soit sa culture, est irrésistiblement attiré par les territoires de l'entre-deux.

Que l'on se tourne vers ces spectacles ou rites où le porteur de masques mi-homme mi-animal, mime dans ses gestes et le rythme de ses déplacements ceux de l'animal qu'il est sensé incarner. C'est dans ces instants singuliers que l'on est le plus à même de mesurer la charge magique et énigmatique du masque. C'est alors que " le masque rend l'homme à l'animalité ", dira Georges Bataille et que " la sauvage destruction de la normalité humaine - qui appartient en propre à la nature" se révèle à l'homme. La normalité humaine abolie, il est alors possible pour l'artiste de penser et créer des formes inhabituelles qui empiète bien souvent dans l'univers fantastique.

Le masque Walu, conservé au Musée Barbier-Mueller (Mali, Dogon, bois fibres végétales, traces de pigments minéraux blancs), avec ses traits anthropomorphes et ses cornes d'antilope relève de cette alchimie. Porté lors des derniers rites de passage, au cours de danses, son pouvoir est sacré et sa charge magique redoutable pour les non initiés. Les yeux, la bouche protubérante aux lèvres arrondies qui semblent commander le silence et le respect, ainsi que le nez, appartiennent au registre humain. Seules les cornes rappellent la présence animale qui habite ce masque. Mais ce qui, sans doute, retient le plus l'attention, c'est le sentiment de peur et de vénération soumise qu'il inspire. En mimant l'apparence de l'animal, en associant l'humain à l'animal, et en cédant ainsi place à l'univers surnaturel, le masque s'investit d'une puissance encore plus redoutable.

2/ De l'intérêt des artistes africains pour les animaux capables de mimétisme et de transformations "magiques " (le caméléon, la mante religieuse...)

Le répertoire des animaux utilisé dans la conception des masques africains est varié. Il en est néanmoins qui attirent plus que d'autres le regard et qui éveillent plus que d'autres l'imagination : ceux qui sont capables de mimétisme, et de transformations magique, tel le caméléon ou la mante religieuse.

- a/Le caméléon :

Ce reptile, lié au feu et au soleil est fréquent dans les arts africains en général. Il joue un rôle démiurgique dans la création des hommes, et est considéré comme un intermédiare sacré entre le monde des hommes et les forces ouraniennes. Ainsi, chez les Dogon, ayant reçu toutes les couleurs, il est lié à l'arc en ciel, chemin qui unie la terre et le ciel. Il intervient souvent dans la parure de bijoux (pendants, anneaux et autres petites sculptures décoratives). On le trouve également sur les masques banda des Baga et Nalou de Guinée, sur les masques Afo, et sur les portes et masques des Sénoufo qui associent le caméléon à l'idée de sorcellerie et de connaissances premières. Dans certaines sociétés africaines, chez les Winiama du Burkina Faso, il est redouté, du fait de son habilité à se métamorphoser, et à disparaître aussitôt grâce à ses changements de couleur. Il change d'ailleurs de couleur à volonté et, dans certaines légendes, chez les Peuls notamment, son caractère et son rapport au monde diffère selon qu'il fait jour ou nuit. Au sens diurne, c'est un être doué de sympathie et capable d'entretenir un commerce agréable avec les hommes et de s'adapter à toutes les circonstances. Au sens nocturne, il devient hypocrite, versatile et évolue au gré des intérêts sordides.

Il est intéressant de lire ce que l'écrivain Amadou Hampate Ba écrit à propos de la nature double du caméléon :

"Comme tout symbole, celui-ci comporte une interprétation positive et une interprétation négative, en raison du dualisme inhérent à toute chose. Comme nous l'avons dit à l'occasion de la question n°1, de même que la journée est composée d'une face obscure (la nuit) et d'une face lumineuse (le jour), toute chose comporte deux aspects, l'un diurne et l'autre nocturne.

Dans son aspect faste, ou diurne, le caméléon représente un être extrêmement prudent et avisé, adroit, et dont l'idéal reste fermement fixé. En effet, le caméléon ne tourne jamais sa tête à droite ou à gauche. Personne ne peut le faire dévier de la direction qu'il a prise. Seuls ses yeux tournent pour regarder autour de lui. Les yeux représentent ici les moyens qui lui permettent, sans perdre son but, d'examiner les conditions environnantes. En outre, dans l'intérêt de son évolution, il prend la couleur de l'ambiance, c'est à dire qu'il s'adapte aux conditions de l'endroit qu'il traverse, de manière à ne pas heurter. Il s'agit là non d'hypocrisie, mais de sage prudence (...) Dans son aspect nocturne, ou négatif (il s'agit du défaut de la qualité...), le caméléon symbolisera l'hypocrisie, le retard, l'apathie et l'entêtement, tandis que ses yeux se tournant dans toutes les direction symboliseront l'indiscrétion "

(Extrait de "Aspects de la civilisation africaine", Amadou Hampaté Ba, 1972, pp.40-42)

De manière générale, en terme symbolique, il représente la puissance de la transformation magique. Voici deux exemples de masque qui ornés de caméléon montrent encore une fois l'importance de ce reptile dans l'art africain

Masque, Côte d'Ivoire. Pré-Sénufo. XIIè et XIIIè siècle (?) © Musée Royal de l'Afrique Centrale, Tervuren.
Photographie de Jean-Marc Vandyck

"Ce masque Pré-Senufo a été découvert fortuitement dans une tombe ancienne au nord du Ghana. Ce visage féminin hiératique, surmonté d'un caméléon et paré d'éléments latéraux, ressemble aux masques Kpeliye actuels et pourrait en être l'archétype." (Laure Meyer )

" La culture des Baga, qui vivent dans la zone de mangrovessituée sur la côte septentrionale de la Guinée, s'apparente àcelle des Nalu avec lesquels ils partagent beaucoup de manifestations rituelles. Leur langue est proche de celle que parlent le Landuman (groupe des langues temne). Les Baga semblent avoir occupé autrefois la région montagneuse du Fouta Djalon au centre de la Guinée et avoir migré vers la côtesous la pression des Fulbe musulmans (entre le Xve et le XVIIIe siècle). Ce faisant, ils ont préservé une partie de leur patrimoine culturel mais les assauts répétés du prosélytisme islamique, de l'administration coloniale française et du régime dictatorial de Sekou Toure ont eu raison de presque toutes leurs institutions traditionnelles. Actuellement, certaines cérémonies anciennes, telles les sorties de masque, sont réactualisées comme divertissement dépourvu de tout caractère sacré.

Masque bandan. Baga (Guinée)
Bois. Hauteur : 123 cm. Largeur : 33 cm
© Royal Museum of Central Africa.
Photographie de Jean-Marc Vandyck

Population mal connue, les Baga sont célèbres pour leurs créations plastiques et semblent avoir défini par le biais de leurs objets rituels, une identité ethnique impossible à réaliser sur le plan politique en raison des mouvements migratoires et des diverses phases d'acculturation. Ce masque banda appartient à la série d'objets autrefois sacrés et dangereux qui réapparaissent dans les manifestations populaires baga (fêtes, récoltes, visites officielles...) Associé à tort à une prétendue société simo - les anthropologues n'ont pas réalisé que simo était le terme susu (langue d'une ethnie voisine) pour désigner les choses sacrées - ce masque intervenait néanmoins dans un contexte rituel précis. Investi d'un pouvoir extrêmement sacré et dangereux, il représentait un esprit protecteur du village, ne pouvait être approché que par les anciens et sortaient au cours de cérémonies organisées lors des initiations, des semailles, des mariages, etc. Sa morphologie caractéristique réunit des éléments appartenant au monde humain, aquatique, et chthonien, et représente la puissance conjuguée de ces différentes forces qui se côtoient, s'opposent et se complètent. La danse du porteur qui rampe, court, vole et saute au rythme d'un tambour à fente, est également une évocation des éléments naturels avec lesquels l'homme doit composer. Ce masque associe la mâchoire d'un crocodile à un visage humain surmonté de la coiffure à crête caractéristique des femmes peules. Des cornes d'antilope, un arc souvent assimilé à un serpent, une queue de caméléon et des oreilles de mammifère complètent la composition. Traces de polychromie noire, rouge et blanche. "

(commentaire de Mme Anne-Marie Bouttiaux)

AMB B. Holas, 1947; F. Lamp, 1992, G. Van Geertruyen, 1976.

b/ La mante religieuse

Elle fait partie des insectes les plus vénérés par les conteurs africains. Outre ses dons de transformation et talents d'illusionniste, elle inspire les créateurs par ses traits anthropomorphiques. Comme l'homme, elle a par exemple la faculté de regarder, et de tourner la tête pour percevoir ce qui l'entoure. Les entomologistes définissent la mante religieuse par le terme d' "épaphrodite ". Elle peut feindre la mort ou, réflexe mimétique, retourner à son gré au règne végétal pour tromper son ennemi.

C'est un insecte qui en Afrique comme en Occident bénéficie, pour reprendre les termes de Roger Caillois, d' " une capacité lyrique ". Le peintre surréaliste André Masson, comme les conteurs africains, s'est passionné pour son aptitude au déguisement.

c/ L'exemple des Masques papillons Bwa et Gurunsi:

Au Burkina Faso, les papillons aux ailes ornées d'ocelles sont un objet de fascination pour les sculpteurs. Ils ont inspiré la création de masques parés de grandes plaques horizontales qui évoquent des ailes déployées. Il existe deux catégories de masques à lame papillon : les masques gurunsi qui sont entièrement recouverts de motifs peints concentriques qui rappellent les ocelles caractéristiques du lépidoptère; et les masques Bwa, souvent de couleur blanche, et rehaussés de motifs géométriques noirs et de quatre ocelles circulaires. Les masques papillon sont revêtus lors des rites agraires, à la fin de la saison sèche. Les hommes qui les portent dansent, en imitant les mouvements virevoltants et légers du lépidoptère. C'est ainsi qu'ils invoquent le retour des pluies bienfaisantes qui rendront vie à la terre.

Dans les masques Bwa ou Gurunsi, c'est sans nul doute l'apparence masquée des papillons, et l'association ocelles/ yeux humains qui ont retenu l'attention des sculpteurs du Burkina Faso. Ils ne sont certes pas les seuls à s'être arrêtés sur les jeux de déguisement des papillons et sur le pouvoir envoûtant de leurs ocelles.L'enthomologiste Jünger a merveilleusement décrit le charme poétique des papillons des Tropiques qui, lorsqu'ils déploient leurs ailes, laissent entrevoir leurs ocelles en forme d'yeux. L'instant est "bouleversant ", écrit Jünger." S'ils le font par battements ", poursuit-il, "l'observateur ressent un bonheur somptueux; il est gagné par le rythme de la vie, auquel son coeur, lui aussi, est soumis. Je me souviens d'un morpho à l'allure princière, qui me ravit ainsi, dans un boqueteau proche de Santos : quand les ailes se refermaient, elles luisaient comme un brocart d'or; ouvertes, comme des miroirs d'argent, sur un fond d'azur qui leur a valu le nom de Célestes. L'envoûtement devenait deplus en plus fort, comme le regard d'un oeil qui, de battement en battement de paupières, vous plonge dans une hypnose de plus en plus profonde, de plus en plus impérieuse." ( Extrait de Chasses subtiles, p 45).

3/ Masques de l'invisibilité au pays bambara ?

Trouver le masque qui vous soustraiera au regard de l'autre, et qui permettra de voir sans être vu, et de disparaître dans les instants de menace, qui n'a pas un jour souhaité une telle découverte ? Certains animaux, peuvent, gâce à leur don de camouflage, se confondre avec la couleur d'un feuillage et disparaître en un clin d'oeil. En Afrique, la préférence va souvent vers des animaux qui bénéficient de ce pouvoir " d'insibilité ". Il en va ainsi du buffle qui, dit-on, malgré sa taille imposante peut virtuellement disparaître le jour, et n'apparaître qu'au crépuscule. Sa nature "crépusculaire " et son apparente invisibilité le rendent doublement dangereux pour les autres animaux, et c'est en cela qu'il qu'il revêt un caractère héroïque auprès des sociétés africaines. Les masques de buffle du Sud de Suku sont d'ailleurs toujours portés au matin et au soir, mais jamais en plein jour, puisque c'est à ce moment de la journée qu'il échappe à la vue des hommes.

Germaine Dieterlen pense avoir décelé un masque qui rendrait invisible celui qui le porte, au pays bambara : "Au cours de soirées nocturnes ", écrit-elle, " les premiers danseurs, entièrement vêtus de paille de riz sauvage, tournoient dans l'obscurité la plus absolue, tous feux éteints, car leur apparition connote les premiers travaux de la création du monde, exécutés dans le néant et la nuit primordiale, dans la "clavicule divine". Il existerait un masque correspondant chez les Dogon, le masque " Amma Tan " ou "Porte de Dieu" qui représente l'oeuf du monde au moment de son ouverture.

Le rêve et la poursuite de l'invisibilité ne participent- ils pas en fin de compte d'un désir de réintégration et pénétration du monde naturel ? Car devenir invisible, n'est-ce pas déconstruire son enveloppe corporelle, disperser chacun de nos atomes dans l'infiniment grand ? L'invisibilé mettrait un terme définitif à la séparation du corps et de la nature. Ce rêve semble traverser l'humanité entière. L'art moderne occidental lui a consacré quelques-unes de ses plus belles créations, qu'il s'agisse de l'oeuvre littéraire d'un Wells ou des peintures surréalistes de Salvador Dali

----- Mimétisme et rêve d'invisibilité dans les arts occidentaux :

a/ "L'homme invisible" de H.G. Wells

La littérature de Sciences fiction, notamment, s'est intéressée de près aux phénomènes de mimétisme. Cédant comme toujours au goût du paroxysme, quelques-uns de ses auteurs ont montré comment, poussé jusqu'à son extrême, le pouvoir du mimétisme pouvait conduire à des expériences humaines terrifiantes. C'est le cas de Wells, dans un des plus célèbres romans L'homme invisible . Griffin, jeune chimiste inconnu, découvre une formule chimique qui va bouleverser le cours de son existence, le sortir de l'anonymat et des vicissitudes de la vie provinciale. Sa découverte l'investit du pouvoir de l'invisibilité. En quelques heures, son corps se métamorphose pour devenir aussi transparent que le verre. Toutes les particules de son corps sont "atomisées " " dématérialisées "et disparaissent pour pénétrer " la magie contractée de l'univers" (Dali)

Extrait de L'Homme invisible: "I shall never forget that dawn, and the strange horror of seeing that my hands had become as clouded glass, and watching them grow clearer and thinner as the day went by, until at last I could see the sickly disorder of my room through them, though I closed my transparent eyelids. My blood and arteries faded, vanished, and the little white nerves went last. " Autrement dit, Griffin accède à la puissance du magicien et du sorcier. Mais ses pouvoirs entraînent aussitôt des conséquences néfastes : Griffin est exclu par les autres qui sont épouvantés par l'étendu de son abilité à disparaître. Griffin constitue une menace puisqu'ils n'arrivent pas à localiser la source du danger. Dans un deuxième temps, Griffin, conscient de la force qu'il détient, glisse vers la mégalomanie et la folie du terroriste avide de régner par la terreur. " I could be invisible ! I repeated".To do such thing would transcend magic. And I beheld unclouded by doubt, a magnificent vision of all that invisibility might mean to a man - the mystery, the power, the freedom ».

b/ L'Homme invisible de Dali : " Je pénètre de plus en plus en plus dans la magie contractée de l'univers".

--- Masque, Mimétisme et transformation dans d'autres cultures traditionnelles :

Cet intérêt pour le mimétisme et phénomènes de transformations s'observe dans un grand nombre de sociétés traditionnelles. Les procédés de métamorphose fréquents dans l'environnement animalier ont sans doute inspiré la création de ces grands masques que l'on nomme "masque à transformation"et qui sont utilisés, par exemple, par les Indiens et les Esquimaux. Dans le dernier cas, l'animal et son double humain sont représentés sur la même face soit simultanément, soit grâce à un dispositif de volets mobiles. Lorsque ces volets sont fermés, le masque revêt l'apparence d'un animal ressemblant à une tête d'oiseau et lorsqu'ils sont ouverts, ils découvrent les traits d'un humain. Ces masques à transformation permettaient aux danseurs qui les portaient de se transformer lors des rituels d'hiver.

4/ Mimétisme dans le monde animalier

On l'a vu, le masque existe également dans l'espèce animale. "La protubérance frontale du fulgore en forme de mufle de saurien est un masque, la collerette érectile du lézard chlamidosaurus Kingi en est un autre, comme la face humaine des chouettes. Les ocelles ou les cornes de nombreux insectes sont des masques par l'apparence comme par la fonction...." (Roger Caillois dans Les Cahiers du centre Pompidou).

Mais à la différence des masques créés par l'homme, ceux-ci sont héréditaires et génétiques. "Le comportement lui-même, qui vient renforcer par une posture précise l'efficacité de l'imitation, ne doit rien rien à l'apprentissage », précise Claude Nuridsany, Si l'insecte adopte l'attitude qui convient à son rôle d'emprunt, c'est que ces gestes mêmes sont inscrits dans la mémoire de ses chromosomes. " ( Microcosmos, p 122)

Dans tous les cas d'espèces, le mimétisme constitue une "arme " nécessaire à la survie. Il permet d'échapper à la vue d'un ennemi potentiel, et parfois d'approcher plus facilement la proie convoitée. Pourtant, il arrive que le camouflage se retourne contre celui qui en use, ou qu'il soit détecté par un autre animal.

Il existe dans le monde des insectes diverses formes de mimétisme :

Le mimétisme offensif et défensif. L'homochromisme évolutif qui permet à l'insecte de changer de couleur en fonction du lieu où il se trouve. L'homochromisme périodique qui se produit à chaque changement de saison. Enfin, certains insectes sont capables d'imiter la forme et les couleurs d'une autre espèce afin de se protéger de leurs prédateurs. Tout comme le smerinthus oscellata, qui au repos cache ses ailes inférieures, et qui lorsqu'il est menacé, déploie ses ailes qui portent deux gros yeux bleus sur fond rouge qui ont pour effet d'épouvanter son agresseur. Dans l'affect qu'il provoque sur son ennemi, le masque du smerinthus oscellata rappelle que certains masques africains sont également conçus pour répandre l'effroi et la terreur.

A propos de ce masque Grebo, Laure Meyer écrit : " Symbolisant le caractère implacable du combat, ce masque de guerre peut avant tout terrifier. Rien n'infléchit ou n'adoucit la ligne rigoureusement droite du nez, la bouche rectangulaire aux dents menaçantes ou les protubérances des yeux. Ces masques apparaissaient dans les batailles, dans les danses qui les précédaient et dans les funérailles des membres du groupe et de guerriers de même âge. " (Laure Mener, Afrique noire, Masques, sculptures, Bijoux, Paris, Terril 1991).

 

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