Ce vigoureux talent de l'art contemporain burkinabé tente, selon ses mots, d'approcher l'inacessible mystère humain, de raconter le passé, le présent,le futur.

Pour qu'une chose soit intéressante, il suffit de la regarder longtemps. Claude-Marie aurait, dans une correspondance artistique involontaire, fait sien ce précepte de Gustave Flaubert. Sa méthode de travail, à travers laquelle se dégage une technique laborieuse, nous permet de le penser. En effet, parcourant l'espace de la création, toile ou pièce de bois, Claude-Marie évoque, reste dans l'inconscient, dans les signes. Malgré eux, malgré l'artiste, l'espace se construit, Claude-Marie s'y reconnaît ! Technique laborieuse disions-nous, technique vigoureuse de gestes brusques qui, sans contrôle, sont tout occupés à rechercher l'harmonie au-delà de l'espace qui s'est construit. Harmonie plus espace égale thème. Quand " l'oeil humain ne bloque plus", quand les aspérités ont été intégrées à la structure globale, s'enclenche le travail intellectuel s'ajoutant à l'activité physique préalable.

Pour Claude-Marie, peindre est synonyme d'ajouter tandis que sculpter l'est de retirer. Cette séduisante définition nous montre comment Claude-Marie a intégré la démarche de la sculpture dans sa peinture, et vice-versa. Sa sculpture n'a de raison d'être que dans le sens où elle façonne la main du peintre ! Sa peinture est épaisseur, collage, pigment, relief. Il l'avoue, il n'éprouve pas la même souffrance sur la toile que dans la sculpture. Pour que ses toiles lui soient satisfaisantes, il doit y retrouver la vigueur charnellement tridimensionnelle de sa sculpture.

Gros oeuvre qui répond à l'objectif de rester ou plutôt de devenir soi-même, fidèlement à ses origines africaines, dans un art qu'il veut universel. Néanmoins, son entourage familial s'est refusé à son art, son père, animiste, voulait qu'il devienne artisan, sa mère lui imaginait un avenir de prêtre. Il le dit sans fausse pudeur, sa religiosité toute artistique lui permit de préciser et de fixer ses sentiments. Même s'il refuse l'intellectualisation de son art par lui ou par les autres, on peut imaginer qu'il est allé vers l'art comme on entre en religion ! Ayant appris à éprouver des sentiments, il s'essaye maintenant à les exprimer. Aujourd'hui, il se contente d'être un arbre offrant les fruits de sa propre modernité.

(Texte de FABRICE SPRIMONT)