J.A. GHATTABA dit "JOE
BIBGBIG", après avoir étudié au Collège d'Art de Kumassi, a notamment exposé au Niger (Centre Culturel Franco-Nigérién), où il a créé pour la Communauté Européenne, la Banque Centrale d'Afrique de l'Ouest ainsi que pour
l'Université de Niamey des sculptures monumentales. En 1996, Gérard Gayou le découvrait au Niger et l'accueillait en résidence (Association Saint-Henri/Castelnaudary). Cet hiver, ses oeuvres ont accompagné la commémoration de
l'Abolition de l'esclavage à l'UNESCO.
Artiste confirmé, GHATTABA compose à partir de tous les matériaux, (plâtre, fer, bois, terre) pourvu qu'ils soient proches de sa main d'homme, et de gestes immémoriaux. Son talent et son
identité explosent dans ses créations, quel qu'en soit le thème. Car tout lui est inspiration. Tout ? Oui : Joe se souvient, regarde, observe, et transfigure ce qui nous semblerait usuel, voire banal.
Un visage attentif penché
sur un livre, une main levée pour frapper, des cuisses ployées dans l'effort de la marche : C'est tout un monde en mouvement que dessinent ces silhouettes fines et grisées, êtres surpris dans l'envol de leurs pas, formidablement
expressifs.
Graciles dans leurs robes de fer, sobres jusqu'à l'épure, elles s'enracinent alors dans notre regard après l'avoir attiré. Cendrées, courbées, libres ou enchaînées, elles nous imprègnent de quelque chose qui nous
dépasse. Car ces silhouettes dignes et humbles rappellent à nos mémoires les gestes ancestraux de notre humanité.
C'est un monde absorbé par des tâches immédiates et simples : se nourrir, danser, voyager, que Joe nous offre. Un
monde où chacun va et vaque, selon un ryhtme millénaire, un monde recréé, s'adressant à tous sans souci d'origines. Le Monde en marche, a-t-on envie de dire : discrètes et silencieuses, les créations de Joe vont quoiqu'il advienne,
de toute éternité.
"Ce n'est pas la célébrité qui justifie l'artiste, ni le bruit qu'il fait. C'est le dialogue qu'il soutient avec les autres hommes, à voix parfois si basse que celui même à qui il parle, croit souvent
n'entendre qu'un murmure" (Jean Marcenac)
Or, Joe n'est pas un bavard : sculpteur, il est à l'intérieur de son oeuvre, donnant toute sa force à la matière.
(TEXTE DE ANNE-LISE COUINEAU)