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Ethique et Esthétique

Rudolf de LIPPE


I. Un embarras qui vient de loin

Quand il est question, actuellement, d'éthique, d'esthétique, c'est une recherche aussi hâtive que désespérée. Un activisme accéléré, technologique avant tout, fait, enfin, comprendre que l'on doit impérativement établir des limites à certaines stratégies. Une éthique de responsabilité envers les phénomènes, les êtres, la Vie faisant défaut et posant des questions trop complexes, un bric à brac de normes positives d'une provenance ou d'une autre, religieuse, philosophique, juridique, etc., ne peut pas remplacer la base concrète pour les décisions à prendre : une approche existentielle du sujet qui permet de le connaître dans ses qualités, et dans ses conditions et facultés propres, pour parler de ses vertus en termes actuels.

De telles connaissances forment le seul fondement d'une esthétique digne de ce nom. Mais depuis que l'esthétique se trouve réduite à une "philosophie du beau", en art ou dans la nature, puis à une manipulation habile de l'histoire des formes, elle est condamnée à survivre en tant que science du décoratif. Elle a perdu son fondement cosmologique – encore évident pour un Socrate – et même toute connotation qui rappellerait que "le beau" est l'expression d'un ordre du vivant.

Ethique vient de ta etha, mot grec pour désigner aussi bien les habitats d'un peuple que ses habitudes, - habitudes pratiquement sacrées parce que élaborées à travers une longue histoire de cohabitation d'une civilisation avec le sol et les plantes, l'air et les êtres vivants de ses sites – conçus et définis comme environnement dans la terminologie épistémologique moderne.

Aisthesis et aisthainomai ont créé un champ de signification d'où les pôles sont d’un coté les sens et, de l'autre, une conscience qui ne dépend pas uniquement de la raison rationnelle. Baudelaire nous rappelle que c’est une "correspondance de l'esprit et des sens".

Les deux domaines, celui de l'éthique et celui de l'esthétique, émergent donc - dans toute civilisation qui accepte d'évoluer en prolongation et en interprétation de l'évolution - d'une souche anthropologique commune : la perception, toujours reliée à ce que Sartre appelle "le domaine biologique".


II. L'histoire d'un divorce

Le divorce de l'éthique et de l'esthétique, imposé d'ailleurs par la rationalité, date de l'époque de la grande philosophie grecque. L'unité légendaire du Vrai avec le Beau, chez Socrate, surgit des rapports de l'un et de l'autre avec la tâche ultime, vivre bien et juste –c'est-à-dire, l'éthique. Mais cette unité était déjà plus que précaire puisqu'elle se voyait, par ailleurs, désavouée et minée par la méfiance exemplaire vis-à-vis des sens. Les sens, base de l'esthétique et de l'éthique, sont soumis à la critique de la théorie rationaliste de la connaissance, aliénant le savoir des expériences existentielles de la Vie et du Monde de notre vie. Ce savoir, souvent gestuel ou implicite, sera remplacé progressivement par des systèmes de jugements basés sur des arguments explicites.

Depuis, le corps, qui est ce que nous avons en commun avec tout ce qui vit, est suspect. On juge qu’il détourne l'âme de la poursuite du Vrai par le raisonnement. Les sens, réduits d'autorité au nombre de cinq, sont mis en quarantaine sous prétexte qu’ils sont la cause de faux jugements, puisqu'ils nous condamnent à la tromperie.

Toute l'histoire de la pensée occidentale, dans ses écoles et courants prédominants, n'a fait qu'approfondir cette faille, creuser ce fossé, forger cette opposition.

Ainsi ce qui s'exprime à travers certaines formes, en art comme dans le quotidien, c'est-à-dire les énergies, les perceptions, les impulsions, est mis à l'écart de l'attention, la théorie se préoccupant des formes. Le résultat fixé et abstrait l'emporte sur les processus concrets. Henri Bergson dira que la pensée a éliminé du mouvement ce qu'il a de mouvant, remplaçant le trajet par la trajectoire, qui, elle, présente aussi l'avantage de se laisser mesurer de façon exacte.

C'est Descartes qui a consacré l'histoire anthropologique européenne d'une idée fixe : les sens nous trompent. C'est bien une idéologie rationaliste, fondée sur une erreur de principe. Il a jugé que les sens humains, et leurs facultés de percevoir ne seraient que des instruments de mesure. La démonstration exemplaire le met en évidence. Je vous ai vu devant moi, il y a un instant, de toute votre taille ; maintenant, éloigné de moi, je vous vois beaucoup plus petit – un mensonge de la vue. Voilà l'erreur. Descartes, obsédé par la recherche d'une objectivité exacte et abstraite, n'a pas réalisé que nos sens ne sont pas des instruments de mesure, mais des organes de mise en rapport : de ce qui est autour de nous avec ce qui est à distance, etc.

La notion même de la perception est si profondément atteinte par cette fausse prétention qu'il est bien difficile d'exprimer en français ou en anglais ce que l'expression allemande de Wahrnehmung peut faire sous entendre, même si l'usage de la langue tient peu compte de la signification étymologique du mot : Nehmen est un verbe qui signale une certaine réceptivité, et wahr présente une certaine consonance avec le vrai. Voilà une constellation linguistique complexe et peu commode à rendre en traduction. Un Alexander von Humboldt pouvait formuler sa méthode en science de la nature par extension programmatique de Wahrnehmung :"connaissance et réjouissance" pour s'approcher des "vérités de la nature".


III. Perception

En français comme en anglais, on ne peut guère rendre l'esprit d'une telle approche. Les dictionnaires français nous disent en premier lieu que percevoir signifie "recouvrement des impositions par le percepteur: la perception d'une taxe, emploi : bureau du percepteur, obtenir une perception". "Le Petit Larousse" auquel se réfère tout le monde donne en second lieu cette définition, "fig. action de connaître, de percevoir par l'esprit et les sens, résultat de cette action : la perception des couleurs, des odeurs." Si, en allemand, nehmen garde un sens ambivalent entre saisir et recevoir, entre un caractère actif et un caractère passif, l'action est bien claire. Aucun doute, l'homme est le maître de l’acte de percevoir. Et le lexique ajoute, pour préciser, "enregistrer les cohérences de la réalité avec les concepts de l'esprit". D'où cet esprit souverain tient-il ses concepts? Depuis qu'on ne répond plus, comme le faisait un Descartes, que nos concepts sont des "idées innées", données par un dieu prévoyant et suffisamment parfait pour ne pas munir ses créatures d'instruments peu valables, la question reste ouverte ou, de préférence, ne se pose pas.

"Le Trésor", dictionnaire plus sophistiqué, parle d'abord d'"opération psychologique complexe, par laquelle l'esprit, en organisant les données sensorielles, se forme une représentation des objets extérieurs et prend connaissance du réel". Il s'agit d'une opération de l'esprit que l'on qualifie de "complexe" au lieu d'évoquer les concepts dont la paternité doit rester incertaine depuis la mort de Dieu, en théorie de la connaissance en tout cas. La séparation ontologique et présupposée entre "intérieur" et "extérieur" a pour conséquence que le vis-à-vis de l'homme doit exister, maintenant, sous forme d'"une représentation" que les "données", transformées en "objets" de l'esprit humain, doivent à celui-ci. Le dualisme entre "connaissance et réel" restera bien établi. On précise, tout de même, que "l'acte de prendre connaissance" peut être opéré par des instances d'ordres aussi différents que "l'intention, l'intelligence ou l'entendement". Si une co-existence de l'homme avec le monde devient cachée sous une re-présentation qui dépend unilatéralement de l’esprit, souverain de la connaissance épistémologique, le "Trésor" cite par contre Gabriel Marcel, parlant d'une "perception interne des états de notre corps". Cette citation reconnaît implicitement que nous sommes tout à la fois sujet et objet, dans la terminologie présupposée, de notre perception. Explicitement, il faudrait aller plus loin et savoir que les sens en tant qu'organes physiologiques sont du domaine de la nature, de l'évolution et qu’ils n'agissent, par conséquent, jamais que par ré-action au contexte concret de leur vie. À ce moment-là, "l'intuition", plus évident encore, "l'entendement", prennent un sens de réciprocité : la perception se présente alors comme rencontre, réunissant les deux cotés en un acte de réponses et contre réponses. L'affectation du "sujet" par "son objet" devient la source des procédés sensoriels et autres.

L'activisme de l’homo sapiens sapiens retrouve son complément. Redevenons également homo patheticos, homme aussi passionné que passif. Retrouvons notre faculté de sensibilité réceptive, la vertu de "réaliser" ce qui est, avant de le conformer aux concepts projetés sur tout ce qui vient à nous. Aucune création n'est possible sans cette source existentielle. Les artistes sont les premiers à être conscients de cette condition élémentaire et j'estime qu’ils sont appelés, exemplairement, à la défendre.

Perception, en anglais, est expliqué, dans le "Oxford Dictionary", tout d'abord comme "action of receiving". Voilà, une très jolie ambiguïté , souligné par la formule "the taking cognizance or being aware of objects in general." "Awareness" évoque une conscience attentive résultant d’une réceptivité active. Le "Oxford Dictionary" mentionne une signification médiévale importante, "perception of the Holy Eucarist", mais laisse retomber cette réminiscence dans les oubliettes de l'histoire, sans chercher quelque transposition séculaire par la suite – on pourrait imaginer une connotation spirituelle, telle que l'inspiration.

Au contraire, le dictionnaire passe à une citation de Francis Bacon, père du programme sciences exactes. "… fact of being without affected by an object contact, though consciousness is des absent". L'hégémonie du sens de la vue sur les autres actes de percevoir, notamment du toucher, s'affirme. Et, comme Descartes, Bacon instrumentalise ces organes pour simplement obtenir des mesures exactes quand il précise: "… in all bodies, sometimes far more subtil than the senses: a weatherglass will find the best difference of the weather if hot or cold when men find it not…"

C'est précisément le commencement d'une stratégie de la civilisation moderne que "la philosophie Poilâne" est en train d'inverser. Lionel Poilâne a formulé un principe de la réorganisation radicale dans ses ateliers de boulangerie: "L'homme doit, lors de chaque acte, faire un choix". Poilâne a éliminé autour des fours tout instrument de mesure pour laisser le boulanger juger de la température de l'eau qu'il rajoute à la farine, du feu qui doit recevoir la pâte du pain ou du gâteau en vue de la juste cuisson. Ce principe du choix impliqué dans l'action est la base de toute éthique. Le fait de choisir réintègre les facultés des humains aux procédés que nous concevons, que nous mettons en œuvre et auxquels nous soumettons les éléments nécessaires. Poilâne faisait observer que le thermomètre sera plus précis dans les limites de ses critères propres, mais que la conjonction de nos sens sera en définitive plus juste. Écouter le bruit du feu, sentir la chaleur, réaliser les nuances dans la couleur des braises et de la flamme, voilà qui veut dire laisser agir nos sens en organes de mise en rapport qu'ils sont en vérité.

Probablement l’ "Oxford Dictionary" n'en n'est pas si loin quand, en cinquième lieu, perception est interprété par la formule suivante: "The intuitive or direct recognition of a moral or aesthetic quality, i.e. the truth of a remark, the beautiful in objects". N’implique-t-elle pas qu'il y a d'autres ordres de la réflexion que celui de la "raison pure"? Les réponses de nos sens ne seraient-ils pas autant de façons de refléter ce que nous rencontrons, ce qui nous affecte et ce que nous touchons au travers de réactions sensorielles? Mais, il est vrai qu'une telle responsabilité s'acquiert par les écoles de l'expérience, par la conscience attentive au choix inévitable et existentiel qui doit être développée au plus haut niveau possible.


IV. La contribution des artistes

Peut-être la perception reprendra t-elle ainsi toutes ses connotations entre sensibilité et conscience attentive, entre recevoir et apprendre, sentir, ressentir et être affecté, toutes ses dimensions jusqu'à celle du sous-entendre et celle d'un sur- réalisme. Enfin, tous les champs de l’ homo patheticos. Se sentir et se savoir en résonance avec le monde, qu'il soit qualifié d'environnement naturel ou social, historique, industriel, artistique, émotionnel…

Dans le cadre de n'importe quelle société traditionnelle ces facultés humaines sont requises et développées en réponse aux exigences de la co-habitation avec la part de terre que l'on habite et dans le contexte pratique de tous les métiers. Cultiver la terre demande autant d'attention que d'habileté, de force physique, que de prévision bien avertie. Travailler le bois ou l'acier, la laine ou la peau demande autant de savoir faire traditionnel que d’astuce dans l'improvisation, de connaissance de la matière et de soi-même. L'industrialisation a transformé tous ces procédés en processus prédéterminés et exécutions mécaniques. Ce qui ne se présente pas en tant que fait manifeste, processus précisément précalculé, fonction opérationelle n'a plus beaucoup de chances d’entrer dans les définitions de la réalité.

Mais c'est justement l'activisme déchaîné de l’homo sapiens sapiens, de l’ homo faber à l’homo economicus qui nous oblige à réfléchir au rétablissement de certaines limites, une éthique, complément d'une prétendue omnipotence technique, et à refermer le fossé humain, c'est-à-dire, retrouver nos résonances avec notre monde, une esthétique digne de ce nom.

Certaines tendances en sciences naturelles et en recherches techniques annoncent un retour de la recherche à une réceptivité plus tôt qu’à une extension infinie des stratégies qui nous ont entraînés dans les impasses écologiques et des civilisations : bio feed back, bionique (technique imitant les observations des évolutions et rythmes de la nature) … Mais ce sont surtout les arts qui sont appelés à reprendre le rôle de gardiens de la Perception dans les sociétés où l’art de la main est industrialisé comme les approches des sens, où une mécanique fatale règle les rencontres entre humains aussi systématiquement que la communication.

Il y a plus d'un siècle que l'un des jeunes sculpteurs qui travaillaient avec Rodin lui parlait de sa dépression : son père, qui taillait la pierre pour les monuments et les maisons des gens était artisan utile de par les moyens de son métier. Mais lui-même, devenu artiste ? Rodin lui répond : dans une société où tous, du conducteur de tramway au ministre, détestent ce qu'ils font, l'artiste est le seul à aimer son travail. Depuis, la situation de la condition humaine s'est aliénée bien plus manifestement encore. Au point que les sociologues américains observent une issue de la crise grâce à une "classe créative" de gens qui sont prêts à sortir des structures pétrifiées de la société, de la production et de la pensée. L'Europe hésite encore et préfère étouffer cet esprit de découverte, d'improvisation novatrice sous différentes formes de "précariat". Un renouveau des vertus de la responsabilité de l'individu et d'un élan vers des innovations ne viendra pas du nouveau libéralisme fondamentaliste, mais des domaines qui se libèrent de l'oligarchie des grands capitaux. Les arts ont même besoin de se libérer de "l'autonomie" où une société matérialiste les avait refoulés, écartés de la réalité qui compte vraiment, économico-politique.

Il peut paraître bizarre de faire appel aux artistes pour réaliser un retour aux sources sensorielles de l'anthropologie au moment même où leurs métiers se renouvellent en large mesure justement par l'adoption des techniques les plus avancées. Il faut pourtant y insister dans des sociétés envahies d'une politique du décoratif et de mise en scène, vr. event management. Au lieu d'aménager des lieux où notre vie pourrait s'épanouir elle est refoulée dans ce que le behaviorism appelle des niches – les thérapies, la soi-disant réalisation de soi etc. En général, elle est exposée à la propagande consumériste, à l'obligation de paraître beau, sain et en forme. Comment l'esthétique pourra t-elle s'enraciner à nouveau dans la vie des sens, dans nos rencontres avec le monde et regagner ses ambitions les plus belles si ce n'est pas grâce aux interventions des artistes et leurs résonances dans la vie de tous les jours ? La perception du beau en tant qu'expression des ordres de la Vie !


V. Un certain paradox

De nos jours, les arts sont invités et amenés à s'étendre dans les sphères de la virtualité. Ils sont incités à s'emparer des outils les plus séduisants de la technologie numérique. Il y a une certaine contradiction dans cette incitation qui leur demande, tout à la fois, de ramener l'anthropologie du 21e siècle à s'allier de nouveau, par la réflexion des sens et de la conscience, aux rythmes de l'évolution. Quand, dans l'histoire de la connaissance et de la pensée, on aboutit, dans les traditions occidentales, à des paradoxes, en principe cela prouve que l'on s'est approché d'une vérité. Les philosophes sont appelés à les formuler aussi clairement que possible. Dans le cas actuel ce n'est pas trop difficile. L'humanité se projette de l'époque de l'écriture dans celle des aventures du numérique – comme elle s'est lancée, à l'époque d'Homère à Socrate, dans les aventures de l'écriture phonétique, de la comptabilité monétaire et de la théorie spéculative. Ce sont des passages de mutation. Tous les efforts doivent être investis pour comprendre et développer la fonction nouvelle et ses conséquences et conditions. Pour y arriver et de plus intégrer cette fonction à la condition humaine d’autres grands efforts sont nécessaires afin de rétablir un équilibre possible. Les facultés du passé sont encore plus importantes pour faire complément aux nouveau potentiel. Certaines vertus comptent d'avantage. Certaines attitudes restent élémentaires, peut-être avec une signification différente.

Accepter en toute conscience d'être en résonance avec le monde, et avec soi-même, est la condition de base pour toute création, d'autant plus pour toute intervention artistique. Réagir en résonance, c'est précisément cette attitude conscience attentive et de sensibilité réfléchie dont surgit la vraie responsabilité, une éthique pratiquée avec conviction. Voilà comment les artistes réintègrent le risque existentiel dans l'expérimentation, l’expérience dans l'action, l'action dans la réaction attentive – modèle pour toute innovation. Être artiste signifie s'exposer aux improvisations de la vie – homo patheticos. Être c'est répondre. Les artistes font toujours un choix lors de chaque acte – choix de matériel, d’outil, du temps … Les artistes savent que voir veut dire être vu ; la perception est au fond un dialogue. Ceci a deux conséquences élémentaires. Contrairement à toute épistémologie et à tout impérialisme de la civilisation, l'intervention artistique ouvre des lieux du possible, des espaces libres où ce qui veut se montrer, comme dit Wittgenstein, pourra se manifester. Et les artistes, dans la lutte contre le tsunami des "images" de reproduction de masse, sont prêts à témoigner de ce qu'ils voudraient partager avec les autres.

Les arts, en opposition à la méthode qui consiste à définir les choses, tâchent de décrire, d'imaginer, d'exprimer leurs impressions par tous les moyens. Ceci ne les empêche aucunement de développer leurs observations en analyses. Leur rôle sera de contribuer à des convergences avec la recherche scientifique qui, elle, doit argumenter à partir de preuves et mesures – convergence d'expérience existentielle et d'expérimentation "objective". En coopération avec les arts nous devons recréer les rapports entre observation, awareness, et les normes, les jugements, les décisions – suivant une logique de la Vie avec ses conditions et ses possibilités.

Multiples et diverses sont les approches qui déjà s'engagent à y contribuer et qui découvrent le beau, au delà et en de ça de l'histoire des formes de "l'Art". Leurs interventions encouragent symboliquement à suivre et sont des modèles concrets à la fois. Elles interviennent dans les structures hostiles à la vie non seulement par l'amour des artistes pour leur travail, mais aussi par l'amour pour ce monde, qu'il s’agisse de la nature où de la société.

C'est à travers et grâce à de telles interventions pour rallier des pôles en divergence que l'humanité s'adapte à des contextes toujours plus complexes – longtemps considéré comme progrès.



© Leonardo/Olats, Artmedia X, Rudolf de LIPPE, 2009
   



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