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Le Bauhaus


De Bau, bâtiment, construction et Haus, maison.
Bauhaus : maison du bâtir, maison de la construction.

Issu de la fusion en 1919 d'une Académie d'art et d'une École de métiers d'art, le Bauhaus était une école d'architecture, de design et d'arts appliqués opposée à l'académisme. Son programme, motivé par un idéal social des plus ambitieux, quoi que diversement formulé et mis en œuvre au cours de son histoire, visait essentiellement à concerter l'art et la technique à l'ère de la reproduction industrielle, et ce au rythme des innovations scientifiques. L'architecte est le maître d'œuvre de la réforme de la vie, de la construction d'un monde nouveau. L'architecture est le réceptacle de la totalité, elle contient l'homme et ses productions. Ainsi, elle détermine l'organisation pratique des rapports suivant un idéal social qui est aussi un idéal d'art total.

Fondé en 1919 par l'architecte Walter Gropius, le Bauhaus est probablement la plus importante école d'art du XXe siècle, généralement associée au style international en architecture, caractérisé par une géométrie de plans simples et d'angles droit. Il s'agit d'une architecture moderne qui se veut fonctionnelle, expressive des technologies contemporaines et d'un idéal social progressiste. Mais les activités au Bauhaus furent infiniment plus diverses que ne laisseraient supposer ces poncifs. L'histoire de cette école est aussi riche que complexe, elle fut le carrefour de tous les grands courants artistiques de l'époque, dans un contexte politique, économique et social intensément chargé. Le Bauhaus était aussi une communauté d'individus assez marginaux, comptant une proportion variable d'idéalistes, de socialistes, d'utopistes, de marxistes, de mystiques et de joyeux lurons. Cette communauté assez colorée, eu égard au conservatisme de la population locale, était ciblée par le pouvoir politique de plus en plus réactionnaire, pour qui le Bauhaus était un repaire de bolcheviks, d'anarchistes et de Juifs. Nombre des enseignants, dont Kandinsky, Klee et Schlemmer, étaient peintres, et ce n'est que dans les dernières années du Bauhaus que l'architecture occupa une place vraiment importante. Ainsi, sous la direction d'Hans Meyer, moins de projets farfelus et de vœux pieux au Bauhaus, plus de réalisations pratiques.

Les idées qui ont prévalu à la fondation et au fonctionnement du Bauhaus, bien qu'elles étaient emblématiques de la modernité du XXe siècle, n'étaient pas inédites. On peut en trouver la source un siècle plus tôt, en Angleterre, dans le déclin du rôle de l'artisan. Déjà au début de l'ère industrielle, le travail de l'artisan se faisait de plus en plus avec l'aide de patrons (pattern sheets). Une reproduction standardisée exigeait moins de compétences et d'habiletés qu'autrefois, et le prestige du métier se trouvait miné par la dévaluation de l'objet hors standard. Mais ce sont surtout les réactions à la Grande Exposition internationale de Londres de 1851 qui furent à l'origine d'une réflexion profonde quant au rapport entre l'art, l'artisanat et l'industrie. Cet événement, dont le but était de favoriser une meilleure entente entre les nations par la promotion et le développement des échanges commerciaux, eût plutôt comme conséquence majeure une prise de conscience aussi subite que troublante. Le contraste entre l'architecture audacieusement moderne du Crystal Palace et le style suranné et surchargé des artefacts qui y étaient exposés, galvanisa quelques esprits perspicaces, dont John Ruskin, William Morris et Gottfried Semper. Le Crystal Palace était une immense construction de métal et de verre, conçue, érigée et démontée dans un temps record, une merveille d'ingéniosité, un bâtiment découlant strictement de considérations pratiques et employant les matériaux et les méthodes les plus récents : des pièces pré-usinées, de fer et de verre.

La recherche d'un nouveau style en art qui corresponde à un nouveau style de vie est en partie issue du rejet des valeurs matérialistes dont l'Exposition de Londres signalait l'apothéose. Le contraste extrême entre l'aspect extérieur du Crystal Palace et son contenu avait de quoi choquer un William Morris, socialiste militant et utopiste. L'édifice, qui ressemblait à une gigantesque serre avec ses 90 000 mètres carrés de verre, abritait un indescriptible bric-à-brac dont l'ornementation de style historique était conforme au goût bourgeois, tourné vers le passé, aveugle au décalage entre la réalité industrielle du XIXe siècle et l'art des XVIIIe et XVIIe siècles.

Les Préraphaélites (confrérie fondée en 1848) ainsi que leur plus ardent défenseur, John Ruskin, espéraient réformer le monde industriel, dont ils avaient une sainte horreur, en se rabattant sur un idéal de pureté et de nature représenté par les légendes du monde médiéval et la peinture primitive italienne (d'avant Raphaël). L'art peut se renouveler en autant qu'il réforme aussi le monde, " Art for life's sake " était le credo du prolifique Morris, designer, poète et agitateur politique.

D'autres ne croyaient pas que l'on puisse tourner le dos au progrès industriel et nier l'histoire, retourner au monde médiéval et à son mode de travail en atelier. Ainsi l'architecte Gottfried Semper prédit en 1852 la nécessaire et inévitable disparition de l'artisanat et il affirma la nécessité de cette disparition pour que l'art puisse sortir de sa torpeur : il faut que le style d'un objet soit adapté aux matériaux dont il est fait, qu'il soit cohérent avec son principe. Tant que l'on éprouve, par exemple, le besoin de camoufler les becs à gaz de la lampe d'éclairage dans de fausses bougies ou de fausses lampes à l'huile, on ne trouvera pas le style, on ne s'élève pas à la signifiance artistique, on reproduit les styles d'autrefois. " L'industrie, la spéculation et les sciences appliquées doivent d'abord compléter ce processus de désintégration des prototypes de l'art avant que quelque chose de nouveau et de salutaire puisse s'imposer. Nous avons les artistes, mais pas l'art. " (Wissenschaft, Industrie und Kunst, 1852). Plus près de nous, on pourrait citer à titre d'exemple les appareils électroniques dans des boîtiers plastiques fini acajou, si populaires dans les années 1970 et 1980, sans compter les innombrables luminaires électriques qui simulent l'aspect des bougies et le mouvement de la flamme. Aussi, de nos jours, on parle d'effet rétroviseur : le cinéma qui doit s'affranchir du théâtre pour trouver son essence, la télévision qui doit à son tour s'affranchir du cinéma et du théâtre.

La fondation du Bauhaus s'inscrit dans un large courant de pensée hérité du XIXe siècle dans lequel l'architecture occupe une place fondamentale. L'industrie de la construction n'est pas imperméable, loin de là, aux considérations économiques, pratiques et esthétiques, ni à l'industrialisation et à la production en série. Une conception fonctionnaliste détermine la forme de l'ouvrage, idée résumée vers la fin XIXe siècle par l'architecte américain Sullivan : Form follows function. Le Deutscher Werkbund est dans cette mouvance : cette association regroupant architectes, industriels et écrivains visait le perfectionnement du travail de production par la concertation de l'art, de l'industrie et de l'artisanat.

Il y a un lien de continuité entre le Arts and Craft Movement et le Bauhaus en la personne d'Henry van der Velde, architecte, peintre, décorateur et écrivain. Sympathique aux théories sociales de William Morris et membre influent du Werkbund, il fut l'architecte et le directeur de l'école des Arts appliqués de Weimar. Avec sa fusion à l'Académie des Beaux-arts de Weimar cette école devient le Bauhaus en 1919, sous Walter Gropius, nommé suite à l'invitation de van der Velde. Gropius écrit dans le Manifeste inaugural du Bauhaus que l'architecture est le but des arts plastiques : la décoration des édifices était autrefois la plus noble de leurs tâches, mais ils sont aujourd'hui isolés et seule une collaboration et une influence réciproques entre les différents artistes pourra les réunir. Gropius professe qu'il n'y a pas de différences entre l'artiste et l'artisan, si ce n'est que l'artiste est un artisan exalté. " Ensemble, désirons, concevons et créons la structure de l'avenir, qui réunira en une même forme architecture, sculpture et peinture, jaillissant des mains de millions d'artisans pour s'élancer vers le ciel, tel le symbole cristallin d'une foi nouvelle. "


© Marc Boucher & Leonardo/Olats, février 2004


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