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ETUDES ET ESSAIS > LES BASIQUES > ARTS DE LA SCENE ET TECHNOLOGIES NUMERIQUES : LES DIGITAL PERFORMANCES > QUELS SONT LES TYPES D'ECRITURE (SCENIQUE ET TEXTUELLE) A L'OEUVRE DANS LES DIGITAL PERFORMANCES ?
   
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Quels sont les types d’écriture (scénique et textuelle) à l’œuvre dans les digital performances ?







  1. Introduction
  2. Ecrire / programmer 2.1 Texte animé
    2.2 Ecriture hypermedia
    2.3 Ecriture procédurale
    2.4 Situations
  3. Les " théâtres interactifs " 3.1 Réminiscences aristotéliciennes
    3.2 Improviser
    3.3 Des personnages crédibles
    3.4 Augusto Boal

    Références


Le symbole Ö avant ou après un mot indique un lien vers une autre fiche des " Les Basiques : Arts de la scène et technologies numériques : les digital performances ".





1. INTRODUCTION

« Qu’est ce que le théâtre ? Une espèce de machine cybernétique. »

Roland Barthes, « Littérature et signification », in Essais Critiques, Paris : Le Seuil, 1964, p. 267.


« Le programmeur est un auteur dramatique. »

Pierre Lévy, De La Programmation considérée comme l'un des Beaux-Arts, Paris : La Découverte / Textes à l’appui (coll. Anthropologie des sciences et des techniques), 1992, p. 58.

Trente ans séparent ces deux citations. Dans l’intervalle, des liens réciproques se sont noués entre programmation et arts de la scène :

  • D’une part, les technologies numériques et les réseaux ont donné naissance aux digital performances, lesquelles se présentent sous des formes aussi variées que des CD-ROMs, des environnements immersifs, des représentations sur des scènes, des dispositifs de téléprésence, etc. Ö
  • D’autre part, l’informatique s’inspire parfois de théories théâtrales, en particulier dans le domaine des théâtres interactifs.

Dans cette fiche consacrée à l’écriture dans les digital performances, j’explorerai ces deux aspects.

Rappelons brièvement que l’informatique n’a pas inauguré les relations entre programmation et écriture théâtrale ou chorégraphique. On en trouve les prémices dans des recherches autour de la combinatoire Ö, comme les mises en scène de Jacques Polieri dans les années 1960 ou comme les systèmes de notation du mouvement dansé. Le théâtre et la danse ne se constituent plus comme des récits dramatiques mais comme expérimentation de règles du jeu. Cet aspect s’est développé dans l’écriture scénique (la mise en scène, la chorégraphie) et dans l’écriture des pièces de théâtre.





2. ECRIRE / PROGRAMMER

Les digital performances invitent à revenir sur la question du rapport entre texte et représentation. En effet, la programmation informatique, qui consiste à « traduire abstraitement dans un groupe de règles » [1] , situe le numérique dans une problématique du langage et de l’écriture. Derrière toute création d’objet numérique, que ce soit une image, un son, une odeur, etc., il y a écriture d’un texte, appelé programme, que l’ordinateur interprète.

De la même façon, dans les digital performances, quelles que soient les esthétiques défendues, y compris celles qui rejettent le texte littéraire, un texte est produit : celui qui permet à l’ordinateur de « jouer » la pièce. Cette écriture ne peut être évacuée, elle est consubstantielle aux technologies numériques. Si bien que mise en scène et chorégraphie sont textes et vice-versa. Impossible de distinguer l’un de l’autre. Le programme fait de la représentation un texte, du texte une représentation. Cela ne signifie pas que le texte littéraire est absent des digital performances, mais que la représentation elle-même se définit comme programme et donc comme texte, comme écriture. C’est aussi ce que dit de manière humoristique Igor Stromajer lorsqu’il chante le code HTML de l’une de ses créations pour Internet Ö dans Oppera Teorettikka Internettikka (1998-1999).



Igor Stromajer, Oppera Teorettikka Internettikka (1998-1999)

Lev Manovich considère la base de données comme la « forme symbolique de l’époque informatique » [2] , tout comme la perspective linéaire était la forme symbolique de la Renaissance pour Erwin Panofsky. Toute création numérique, et qui plus est dans les digital performances, repose sur la collecte d’éléments, sur la constitution plus ou moins formalisée de bibliothèques, de banques de données.

Une base de données est constituée de deux éléments principaux :

  • les données elles-mêmes, qui peuvent être de tous types (images, textes, vidéos, sons, extraits musicaux, textures, mouvements de caméra…),
  • les algorithmes qui permettent d’organiser ces données.

Leur accès et leur mise en forme dépendent de la stratégie adoptée. Cette stratégie est écriture.

Souvent, cette écriture est considérée comme « multimédia ». Cet adjectif permet de recouvrir les diverses stratégies développées dans les digital performances. On ne retient alors que la coexistence sur le plateau de différents médias (sons, images, textes). C’est ainsi que sont notamment présentés les spectacles du collectif japonais Dumb Type. Créé en 1984 à l’université des arts de Kyoto sous l’impulsion de Teiji Furuhashi, Dumb Type rassemble architectes, ingénieurs, graphistes, chorégraphes, musiciens, acteurs, peintres, vidéastes, sculpteurs et informaticiens. En 1990, ils commencent une trilogie qui comprend pH, S/N, [or] où textes projetés, sons techno, images fixes ou animées, lumières stroboscopiques… sont samplés, mixés, pour former la trame de déflagrations visuelles et sonores. L’ordinateur est la base de leur processus de création :

« L'ordinateur nous permet de résoudre le problème capital du Japon, celui du manque d'espace. Nous avons à Kyoto un minuscule bureau où on ne peut pas répéter. L'ordinateur nous permet de travailler dans un espace virtuel à la mesure de nos envies, d'inventer et de modifier aussitôt des décors, des mouvements. Par ailleurs, il simplifie l'écriture même des spectacles en permettant d'assembler à l'infini une multitude de diagrammes, textes et citations. Il nous permet enfin de réduire considérablement les coûts de fabrication. Bref, c'est un moyen de travail très naturel, non seulement pour des Japonais, mais pour des artistes qui veulent explorer des questions nouvelles, questions qui n'ont que des réponses évolutives. S/N, c'est deux ans de travail ; j'ai changé des choses, des choses ont changé, des choses m'ont changé ; le système évolutif de nos spectacles nous semble bien correspondre aux évolutions constantes de l'esprit humain. » [3]

S/N, pour Signal/Noise, Some/None, South/North, Shakespeare/Newton, etc. est un spectacle créé en 1993. Régit entièrement par une logique binaire, il évoque l’homosexualité et le SIDA (sujets tabous au Japon) dans un monde dominé par les technologies de l’information et de la communication. Dans les spectacles de Dumb Type, aux dispositifs saturés d’images et de musique électro, où des lumières stroboscopiques provoquent des phénomènes de persistance rétinienne, les corps eux-mêmes se fondent dans le dispositif technologique. Dématérialisés, ils se transforment en « data » parmi d’autres.

Si le vocable « multimédia » peut servir de générique pour décrire les stratégies d’écriture mises en œuvre dans les digital performances, il est possible de définir plus précisément trois grands types d’écritures :

  • le texte animé,
  • l’écriture hypermédia,
  • l’écriture procédurale.

J’emprunte cette classification à la littérature numérique, qui distingue la poésie animée de l’hypertexte et de l’écriture procédurale. On retrouve cette classification, parfois avec d’autres termes, dans de nombreux textes. Par exemple : Bootz Philippe, « La Littérature animée programmée : du mixage des sens à une réévaluation de la lecture », in Actes du colloque Intersens, Laboratoire Musique et Informatique de Marseille (MIM), déc. 2000, http://www.labo-mim.org/ ; Clément Jean, « La littérature au risque du numérique », in Leleu-Merviel Sylvie (sous la direction de) Document numérique, Vol. 5, 1-2 (2001), « Nouvelles écritures », Paris : Hermès Sciences Publications, 2002.



2.1 Texte animé

Les signes textuels sont récurrents dans les digital performances : lettres, mots, phrases sont projetés sur le plateau. Des compagnies comme Dumb Type ou des metteurs en scène comme Robert Lepage font un usage large et diversifié de la projection de texte. Celui-ci n’est pas figé, mais animé, mis en mouvement. Cette mise en mouvement du texte fait basculer l’écrit du côté de la mise en scène [4] . Il ne s’agit plus de mettre en scène un texte, écrit auparavant par un auteur, mais de mettre en scène l’écrit lui-même. On retrouve ce phénomène dans le design des sites Web, dans la conception des CD-ROMs, etc., à chaque fois que se posent les questions : comment le texte doit-il apparaître ? Comment doit-il être perçu ? Le choix de la typographie, du mouvement, des modes d’apparition/disparition… font du texte un acteur à « mettre en scène » dans l’espace du plateau, avec son costume, sa gestuelle, son rythme des entrées et des sorties :

  • Dans Improvisational Theater Space (1996), de la chercheure Flavia Sparacino, le comédien peut interagir spontanément avec les objets de l'environnement virtuel diffusés sur le tulle disposé en avant-scène. Cet environnement conçu au Media Lab du MIT répond aux gestes du comédien, à ses paroles, au ton de sa voix en ajoutant à la représentation du son, du texte, des images et des graphiques projetés sur l’écran. Une méthode de programmation issue de la vie artificielle et de l’approche comportementale donne à ces objets numériques une autonomie de comportement et leur permet de s’adapter au contexte. Ils réagissent aux actions de l'utilisateur ou aux modifications de l'environnement en fonction de leurs propres objectifs. Flavia Sparacino considère le texte comme un acteur, au même titre que les comédiens ou les autres objets numériques. L’une des situations dramatiques proposée est un dialogue basé sur l’improvisation entre un acteur et un « acteur typographique ». Un personnage joue avec ses propres pensées, représentées sous la forme d’un texte projeté sur scène. Le texte est comme un comédien qui réagit et adapte son jeu aux mouvements de son partenaire, à ses paroles, son ton de voix et ses gestes. Les réactions, dans le cas de l’acteur typographique, se traduisent en changement de couleur, de police, de taille de caractère, de rythme d’apparition.

  • La mise en scène de l’écrit est l’un des fils conducteurs de la compagnie française Alis. Les spectacles présentent la manipulation de mots-objets et de signes typographiques (les parenthèses dans 100 Mobiles à part 1 en 1997, « l’alphaballet » L’âme hors du signe en 2011).



    Alis, L’âme hors du signe (2011)

    Ce goût pour les jeux de langage la conduit à la création d’une police spécifique – la police coupable – à l’origine de plusieurs spectacles ( dont La Langue coupée en 2, 2001, La coupure, 2008 et de deux CD-Roms [5] ).



    Alis, La coupure (2008)


    Les spectacles et les installations d’Alis reposent sur la déconstruction des signes – et en particulier des signes linguistiques. La conception de la police « coupable » cristallise cette réflexion. Chaque lettre est coupée d’un trait horizontal. Les deux parties ainsi obtenues sont communes avec de nombreuses autres lettres. Ce procédé permet de combiner ensuite des moitiés de mots entre eux, provoquant des glissements sémantiques dans ce que les auteurs nomment des « poésies à 2 mi-mots ». Les combinaisons de la police coupable d’Alis ont lieu dans le temps, sur l’espace noir de l’écran, au cours d’animations réalisées avec le logiciel Flash. Ce qui est donné à voir, c’est la coupure, et la transformation du sens des mots qu’elle engendre : « droite » devient « orbite », « gauche » cache « courbe », « terre », « lune » et « rond » ont la même partie basse en commun, de « ciel » se détache « clef »… Pour Pierre Fourny, membre fondateur d’Alis, il ne s’agit pas de design ou de graphisme, mais bel et bien de théâtre et de mise en scène :

    « Le noir sur blanc de l’écrit reste très inopérant à dégager toutes les subtilités et les saveurs des demi-mots en mouvement. Le mot écrit doit devenir objet concret, ou être associé à un objet concret, et être manipulé physiquement, ou virtuellement, pour exprimer un sens qui n’apparaîtrait pas sans ce déportement : en bref, la Poésie à 2 mi-mots produit des spectacles. » [6]

Pour ses propres spectacles, mais aussi ceux des autres, Adrien Mondot, initialement jongleur et chercheur en informatique, développe ses propres outils informatiques. Au centre de sa réflexion, l’animation des objets numériques en temps réel basée sur des modèles physiques. C’est ainsi qu’au fur et à mesure des créations il développe depuis 2006 le logiciel eMotion pour electronic Motion (mouvement électronique) et émotion.

« En définissant de nouvelles règles pour créer des mouvements, inspirés du monde réel, eMotion souhaite amener la sémantique au coeur du mouvement. L’autre principal enjeu du logiciel est d’être un outil permettant l’improvisation en direct à partir d’un ensemble simple de règles de comportements, cette dimension étant indissociable de la pratique et de la recherche artistique en spectacle vivant, dont la spécificité est justement d’être… vivant ! » [7]

eMotion permet ainsi de créer des chorégraphies d’objets virtuels, de lettres ou des mots, capables de réagir aux mouvements du danseur sur le plateau. La richesse de ses créations réside dans le dialogue établi entre la scène et l’univers numériques. Citons notamment Coïncidence en 2011 ou encore sa collaboration avec la chorégraphe Stéphanie Aubin pour Légendes en 2007.



Adrien M, Claire B, Coïncidence (2011)


Parce que ce type d’écriture fait appel à des modalités temporelles, et non plus seulement spatiales, Philippe Bootz considère le texte animé comme « un écrit oralisé sans le support d’une détection orale » [8] . Selon lui, le texte animé fait part d’une « oralité dans l’écrit ». En cela, il est proche des écritures théâtrales contemporaines, celles de Valère Novarina, Jon Fosse, Sarah Kane, dont l’une des caractéristiques principales est justement l’oralité. La matérialité de la langue, ses sonorités, son rythme, sont au centre de ces écritures. Elles veulent faire éprouver le temps de la langue, de son jaillissement, c’est-à-dire son oralité, par-delà les absences du corps et de la voix. Ce faisant, l’oralité permet de renouer avec une physicalité de la langue. Ces écritures, comme les textes animés des digital performances, ont en commun le fait de se lire/vivre au présent, dans le flux de leur lecture/apparition.



2.2 Ecriture hypermedia

D’après le Dictionnaire des arts médiatiques , l’hypertexte est un

« programme informatique interactif comportant une structure textuelle non linéaire, composée fondamentalement de nœuds et de liens entre ces nœuds, et mettant à la disposition de l'utilisateur un certain nombre d'opérations lui permettant de se déplacer dans cette structure. Les nœuds sont des blocs de texte qui comportent certaines zones activables (pointeurs, boutons) conduisant à d'autres blocs de texte ou ouvrant des fenêtres comportant des annotations ponctuelles, ces blocs et ces fenêtres pouvant comporter encore d'autres zones activables conduisant à d'autres nœuds, et ainsi de suite. […] Le fait pour l'utilisateur d'accéder aux différents nœuds de l'hypertexte en parcourant son réseau de liens est appelé navigation […]. Le concept d'hypermédia partage avec celui d'hypertexte la même origine et la même structure fondamentale. » [9]

De l’hypertexte, les artistes des digital performances retiennent ce que décrivait Vannevar Bush dans son article As We May Think [10] : notre manière naturelle de penser fonctionne par associations d’idées, sans hiérarchie ni enchaînement logiquement structuré :

  • pour Laurie Anderson, « le plus extraordinaire lors de la réalisation de ce projet [le CD-ROM Puppet Motel, c’est que cela fonctionne comme ma pensée ; je ne pense pas en termes de narration ni d’intrigue, mon esprit travaille par associations, de manière intuitive, et c’est ainsi que Puppet Motel fonctionne » [11] . Ö


Laurie Anderson, Puppet Motel (1996)


  • La Fura dels Baus, compagnie catalane auteur d’un manifeste intitulé Le Théâtre digital, renchérit : « L'hypertexte et ses protocoles suscitent de nouveaux genres narratifs, plus proches des pensées ou des rêves, créant un théâtre intérieur où le rêve devient réalité (virtuelle). » [12]

Ce fonctionnement par associations d’idées est autant le fait de l’artiste qui réalise l’hypertexte, que celui du spectateur qui lit ce texte. Ce dernier (ré)emboîte le pas de l’auteur tout en traçant son propre chemin – linéaire – parmi les différentes possibilités élaborées par l’auteur de l’hypertexte.

Dire d’un texte de théâtre, d’une mise en scène ou d’une chorégraphie qu’ils sont hypertextuels, c’est reconnaître en eux une construction qui n’est pas linéaire, une écriture du fragment. Dans la multiplicité des signes offerts, parfois jusqu’à saturation, le spectateur doit tracer son propre chemin, ne retenir de façon impressionniste que les éléments qui l’ont marqué, et se faire ensuite une idée globale du spectacle, à partir de cette perception partielle et partiale.

Enfin, et c’est peut-être dans ce domaine que la référence à l’hypertexte a le plus de légitimité, les processus de création reposent sur des associations voulues ou fortuites. La façon de travailler de Jean-François Peyret, qui tisse entre eux textes, images et sons au cours des répétitions, dans des partitions évolutives, répond mot pour mot à la définition donnée plus haut.

Si l’écriture hypermédia permet d’associer entre eux des fragments et des objets de tous types, elle offre aussi la possibilité au spectateur de s’associer au processus d’écriture. L’écriture hypermédia est conçue comme une écriture collaborative : elle doit permettre à n’importe quel contributeur de rajouter/modifier/corriger des liens et des contenus. C’est ainsi qu’Internet s’est développé de façon exponentielle. Cette possibilité de « participation » du spectateur a très tôt intéressé certaines compagnies théâtrales, comme la Fura dels Baus.

Dans la plupart des dispositifs scéniques, l’acteur – plus rarement le spectateur – active les liens. Quitte à ce que le spectateur ne perçoive pas la multiplicité des cheminements possibles. La discursivité propre à l’écriture hypermédia est parfois l’objet du processus de création, disparaissant lors de la représentation elle-même :

  • L’exosquelette de Marcel.lí Antúñez est un « costume hypermédia » dont les boutons permettent de déclencher des séquences prédéfinies. Malgré la possibilité de proposer à chaque représentation un nouveau parcours, Marcel.lí Antúñez impose à tous les spectateurs un seul et unique cheminement dans les fragments sonores et visuels qui composent ses spectacles. Ö

  • Pour Site Seeing Zoom, Hotel Pro Forma a défini et enregistré un parcours unique dans les souvenirs des quatre personnages, souvenirs qui font l’objet d’une base de données multimédia dans laquelle il est possible de cheminer. Ce parcours identique est l’objet de la représentation. Le spectacle déroule l’exploration d’un seul fil narratif parmi l’infini des possibles. On peut y voir le désir de maîtriser la dramaturgie de la part du metteur en scène. L’élaboration de cette navigation est une façon de revendiquer sa place d’auteur du spectacle, et de ne pas laisser le spectateur s’emparer du récit dramatique.



    Hotel Pro Forma, Site Seeing Zoom (2000)

L’écriture hypermédia entraîne dans les digital performances une situation paradoxale. Alors que ce type d’écriture éclate l’action principale en une multitude d’événements concomitants, certains metteurs en scène souhaitent non seulement diriger le cours de l’action mais aussi respecter la convention d’une durée de représentation. Différentes stratégies sont élaborées :

  • Figer pour la représentation l’un des parcours possibles explorés pendant les répétitions. Pour renouer avec cette idée du parcours, de la navigation dans des embranchements multiples, les thèmes évoqués dans ces spectacles sont le déplacement, le voyage, l’errance au sens propre (Afasia, de Marcel.lí Antúñez, qui s’appuie sur les pérégrinations d’Ulysse Ö ou au sens figuré (la rêverie dans la mémoire collective constituée par les fragments de Site Seeing Zoom d’Hotel Pro Forma).

  • Délimiter l’espace de la navigation. Le metteur en scène n’étant plus le maître du temps de la représentation, et donc de la succession des événements dans un ordre donné, il s’empare de la maîtrise de l’espace. La navigation, même si elle peut être perçue comme infinie, est en fait circonscrite dans un espace. La représentation consistera alors à explorer cet espace, comme la ville de Can You See Me Now (2001). Ö
  • Confier la navigation à un acteur (ou à un technicien) : celui-ci a alors des contraintes de temps, voire une rythmique qu’il doit respecter, tout en ne reproduisant pas systématiquement le même parcours à chaque représentation. L’acteur étant garant du temps de la représentation et de la courbe dramatique, le spectateur peut à nouveau être impliqué dans le choix du parcours. Dans Storie Mandaliche, spectacle créé en 1998 par l’artiste italien Giacomo Verde, le public choisit la suite de l’histoire à chaque nœud présenté par le « tecno narratore ». Sorte de conteur des temps numériques, celui-ci manipule l’interface numérique en fonction des desiderata du public : « L’idée est que, exploitant les potentialités hypertextuelles de l’écriture numérique, tous les soirs un spectateur puisse décider par quelle histoire commencer le spectacle, alors que le déroulement de la narration sera déterminé par le type d’ « humeur » de la salle, qui pourra indiquer (en dialoguant avec le narrateur) quelle direction suivre en correspondance d’un carrefour hypertextuel. » [13] Il existe également une version installation, où le spectateur manipule lui-même l’interface.



    Giacomo Verde, Storie Mandaliche (1998)

L’écriture hypermédia élabore des stratégies pour circonscrire la liberté du spectateur et sauvegarder peu ou prou la figure de l’auteur-metteur en scène. La gestion du temps, qui est l’un des aspects importants des arts de la scène, se transforme bien souvent en gestion de l’espace. Ce faisant, la notion de récit dramatique est remise en cause : il ne peut plus s’agir d’une suite d’actions enchaînées de manière linéaire, causale, mais davantage de situations. Nous reviendrons à la fin de ce chapitre sur ce terme. On peut déjà remarquer combien ce terme lui-même doit à l’espace, au site : d’après Anne Cauquelin, le site « désigne un espace ordonné en vue d’une action. » [14]



2.3 Ecriture procédurale

Si l’écriture hypermédia met l’accent sur l’association, l’écriture procédurale met l’accent sur le processus. L’écriture procédurale consiste en la création de commandes, c’est-à-dire de règles et d’instructions, exécutées par la machine. Il s’agit donc pour le metteur en scène ou le chorégraphe d’écrire un programme qui lui-même engendrera les éléments de la représentation, au moment même où elle a lieu. L’écriture procédurale est une écriture de type génératif, au sens large du terme. Si la littérature a très tôt expérimenté les algorithmes génératifs pour créer des générateurs de texte, notamment en France autour de Jean-Pierre Balpe et de l’ALAMO, les digital performances n’ont expérimenté ce type d’outil qu’à la fin des années 1990. De plus en plus de compagnies ont recours à ce type d’écriture, notamment en danse.

Avec l’écriture procédurale, dans la dernière décennie du XXe siècle, l’ordinateur devient le truchement par lequel peut s’opérer le renouvellement de la danse contemporaine. Les technologies permettent de réinventer l’écriture chorégraphique, en particulier celle qui fait la part belle à l’improvisation :

  • Dès le début des années 1990, Merce Cunningham marque un profond intérêt pour l’informatique. En 1991, il crée Trackers, une chorégraphie élaborée en partie grâce au logiciel Life Forms, lequel deviendra par la suite Dance Forms. Ce programme d’animation 3D, mis au point par des informaticiens et des chorégraphes (et au développement duquel contribue Cunningham), lui permet d’inventer des mouvements, de construire des phrases chorégraphiques – parfois impossibles à réaliser. Puis il met ces figures à l’épreuve des corps et du plateau, en demandant aux danseurs de parvenir à les exécuter. Le numérique ouvre le champ des possibles. Il affranchit le chorégraphe américain du déterminisme anatomique et de la psychologie. Il lui offre l’opportunité d’aller encore plus loin dans la dissociation des différentes parties du corps ; par exemple en attribuant le rythme d’une jambe à un autre membre comme un bras, un torse, etc. De plus, le numérique lui permet de prolonger ses propres recherches sur le hasard dans la composition chorégraphique, recherches débutées dans les années 1950 en compagnie de John Cage.

  • La question de l’écriture est au centre du travail de la chorégraphe Myriam Gourfink. Les technologies lui permettent d’élaborer un travail entre la partition chorégraphique préécrite (en amont des répétitions) et l’improvisation : « Depuis quelques années mon travail est axé sur l'écriture même de la chorégraphie - écriture qui implique la création de signes spéciaux servant à composer la danse en amont des répétitions avec les danseurs - et sur l'intégration, dans cette écriture, de dispositifs (informatisés) de perturbation et re-génération de la composition préécrite en temps réel. Le but de cette recherche est d'inviter l'interprète à co-créer une partition ouverte. Pour This is my house (2005) les cinq danseuses pilotent par leur souffle et par de lents mouvements - grâce au système de captation développé par l'IRCAM - les processus de modification de la partition chorégraphique, qui s'affiche sur des écrans LCD placés en hauteur. Ainsi la technologie - le dispositif informatique qui est au cœur des relations d'espaces et de temps - permet au fur et à mesure de l'avancement de la pièce, la structuration de situations, de contextes inédits que les danseurs interprètent. » [15]


Myriam Gourfink, This is my house (2005)


Le dispositif technologique évolue en fonction des spectacles mais la ligne de conduite demeure la même : comment grâce à une écriture de partitions en temps réel, à la combinatoire de signes qui représentent des mouvements spécifiques pour chaque pièce, engendrer un processus d’improvisation et de « lecture ouverte » de la part des danseuses ? Depuis 2009 et Les temps tiraillés ce ne sont plus les capteurs qui définissent la suite de la partition en fonction des données recueillies sur le corps des danseuses. La chorégraphe, à l’avant-scène, contrôle l’affichage des partitions pendant le cours de la représentation, en fonction de ce qu’elle observe sur le plateau.



Myriam Gourfink, Les temps tiraillés (2009)


  • Dans un article consacré à l’improvisation chez William Forsythe, Biliana Fouilhoux décrit le processus de création de Eidos / Telos (1995) :

    « Après avoir fixé la structure initiale de la pièce, Forsythe crée de nouveaux facteurs déstabilisants pour les danseurs. Pendant les représentations de la pièce, il en installe des moniteurs visibles uniquement pour les danseurs, Nik Haffner explique leurs fonctions : « un moniteur nous donne le « code du temps » tandis qu’un deuxième montre les lettres de « A » à « Z » dans une succession au hasard. Le dernier est conçu par Michael Saup qui ne se contente pas seulement de montrer les lettres, mais qui, par exemple, a tourné, tordu, fait tomber la lettre « A » d’une certaine manière ». » [16]

    Les lettres sont sélectionnées au hasard par un ordinateur dans une base de donnée. L’objectif est de rompre la répétition à l’identique d’une même représentation et d’élaborer des stratagèmes qui permettent aux danseurs de choisir dans un « catalogue de mouvements » et d’opérer leur propre suite de mouvements en fonction de contraintes établies au préalable. Dans les œuvres des années 1990, Forsythe développe ce procédé afin d’engendrer de l’imprévisible, tant au niveau du corps des danseurs que de la structure de la pièce. L’informatique lui offre la possibilité d’élaborer une écriture chorégraphique complexe.



    William Forsythe, Eidos / Telos (1995)

  • Depuis la création de If/Then en 2005, le chorégraphe Richard Siegal, ancien danseur de William Forsythe, développe un système d’écriture basé sur la syntaxe du traitement conditionnel, couramment utilisé en programmation informatique : si alors sinon. If/Then se présente comme un jeu pour deux danseurs. Ces derniers choisissent leurs mouvements en fonction de règles prédéfinies : si « A » fait x, alors « B » fait y. Si « A » fait y, alors « B » fait z ou n, et ainsi de suite, la structure devenant de plus en plus complexe. Ses chorégraphies ultérieures reposent également sur ce principe. If/Then trouve également un prolongement sous forme d’une installation interactive et d’un système de création chorégraphique disponible en ligne (If/Then Open Source ).

Dans ces dernières expériences, les technologies ne sont pas présentes sur le plateau. Discrètes, mais néanmoins fondamentales, elles ont une influence déterminante sur l’écriture des œuvres. Il ne s’agit pas tant ici de convoquer l’ordinateur comme un instrument mais au contraire comme un principe d’écriture chorégraphique.

Dans le cas des écritures reposant sur des algorithmes génératifs, le programme est susceptible d’engendrer des textes-représentations à l’infini. L’un des premiers artistes à expérimenter l’écriture procédurale au théâtre est Jean-Pierre Balpe, auteur de plusieurs générateurs de textes, notamment de romans. Dès 1997, à l’IRCAM, il crée en collaboration avec le compositeur Jacopo Baboni-Schilingi et les poètes Henri Deluy et Joseph Guglielmi Trois mythologies et un poète aveugle . Ce spectacle repose sur deux générateurs, l’un de texte (poésie), l’autre de musique. Ö



Jean-Pierre Balpe, Trois mythologies et un poète aveugle (1997). Extrait de Personne, film d’Hervé Nisic (1999)


L’année suivante, Jean-Pierre Balpe initie Barbe bleue – un projet d’opéra numérique – qui repose sur trois générateurs : texte (pour le livret et les dialogues), son (pour la musique) et image (pour la scénographie). Tous les éléments du spectacle devaient être générés, de sorte que chaque représentation soit inédite.

La part d’aléatoire induite par l’écriture procédurale a été explorée par le metteur en scène Jean-François Peyret (en collaboration avec les scientifiques Françoise Balibar et Alain Prochiantz) dans Tournant autour de Galilée (2008). Coutumier d’un travail basé sur l’improvisation à partir d’une « partition 0 » (constituée d’un assemblage de textes de différentes natures), Peyret convie créateur lumière, vidéaste, compositeur, danseurs, comédiens, concepteur du dispositif électro-acoustique dès le début des répétitions à élaborer ensemble le spectacle. Tournant autour de Galilée introduit un autre facteur : les déplacements de Bibi la truie, présente sur scène, décident du choix de certaines séquences, comme le rêve que fait Virginia, la fille de Galilée, interprétée par Jeanne Balibar.



Jean-François Peyret, Tournant autour de Galilée (2008)


Le metteur en scène ou le chorégraphe n’écrit pas les spectacles vus par le spectateur, mais leur matrice, leur modèle, au sens mathématique du terme : une abstraction. Il définit l’algorithme, c’est-à-dire les règles du jeu, élabore les bases de données et choisit les objets qu’elles contiennent. Chaque représentation est une combinaison unique et éphémère de tous ces éléments. La génération renoue avec l’éphémère : toute génération est unique, non répétable. Le texte-représentation généré n’existe que pendant le temps où il est perçu.

Ce n’est que dans la comparaison entre plusieurs spectacles générés, et dans l’observation des variantes, que le spectateur peut se représenter le programme, le modèle. Une seule « consultation » ne suffit pas.

Les compagnies multiplient les variantes au cours de spectacles présentés comme des « works in progress » dont les titres rappellent parfois la numérotation utilisée pour les logiciels. POL de Granular Synthesis a connu plusieurs versions, de la 1.0 en 1998, pour sa création, à la 3.0 en 1999. Ces versions sont autant de variations sur un même thème, proches les unes des autres et pourtant différentes. De l’une à l’autre des versions, le dispositif scénique est constant : sept écrans disposés en arc de cercle, spectateurs assis au sol et spatialisation du son. Au cœur du spectacle, la représentation d’un processus, celui de la synthèse granulaire des images et des sons. La durée entraîne une perte de notion du temps - ce dernier paraissant se dilater - et fait prendre conscience du déroulement d’un processus, perceptible dans les infimes variations de l’image et du son. Parfois, ce n’est qu’au bout de plusieurs minutes que le spectateur a conscience d’un changement de forme ou de couleur. Ces gradations subtiles et progressives permettent de tolérer et d’accepter des moments de luminosité intense, ou encore des basses à la limite du supportable. La perception du processus guide l’écriture de Granular Synthesis. L’action est réduite à son déroulement et à son accomplissement.



Granular Synthesis, POL (1999)


Dans l’écriture procédurale, la représentation du processus de création est aussi importante que le résultat lui-même, à savoir le texte-représentation généré. Le texte ne préexiste pas et ne survit pas à la représentation. Pour garder la trace du spectacle, afin de le reproduire, le rejouer ou encore l’analyser, c’est ce texte qu’il faudrait conserver. Le texte-représentation généré n’existe que pendant le temps où il est perçu. Toute génération étant unique, non répétable, l’écriture procédurale renoue avec l’éphémère. Le processus, en replaçant l’éphémère au cœur de l’écriture, rend le temps perceptible. La place centrale accordée au processus a pour conséquence la représentation du temps, ou plutôt son expérience, et non plus la représentation d’une histoire, d’une fable.



2.4 Situations

Dans les digital performances, ce qui se joue, c’est le programme, quelles que soient sa complexité, son autonomie, sa prévisibilité, qu’il s’agisse de texte animé, d’écriture hypermédia ou d’écriture procédurale. Ces démarches sont dans le prolongement des écritures théâtrales contemporaines, lesquelles sont notamment caractérisées par une attention particulière accordée à l’oralité, à l’association et à la fragmentation, au processus. La situation se substitue au récit dramatique. Proposition d’un contexte, de circonstances qui vont pouvoir se déployer au fur et à mesure et selon les interactions, la situation relègue la fable au second plan. En cela, situation et processus ne s’opposent pas, bien au contraire : la situation est le point de départ d’une suite d’événements dont l’objectif n’est pas toujours de raconter une histoire. Il ne s’agit pas de montrer/démontrer une suite d’actions fictives mais de mettre en œuvre le processus d’une métamorphose.

L’importance accordée au processus explique pourquoi certains auteurs préfèrent parler de présentation plutôt que de re-présentation, éliminant ainsi toute référence à la mimesis. Cependant, ce phénomène n’est pas spécifique au numérique : depuis le début du XXe siècle, cette question du processus est centrale dans l’art contemporain, y compris dans les arts de la scène. Il ne s’agit plus tant d’assister à une représentation, de contempler une œuvre finie, que d’expérimenter une « œuvre-en cours », pour reprendre les termes de Paul Ardenne. Hans-Thies Lehmann, dans son ouvrage sur le théâtre post-dramatique, constate que « la catégorie adéquate pour le nouveau théâtre n’est point l’action, mais l’état et la situation. Le théâtre nie intentionnellement la possibilité de « développer une fable », ou, en tout cas, la relègue au second plan. » [17]

L’une des caractéristiques du théâtre post-dramatique est dans le passage de la représentation à la présentation, passage qui réside dans la mise en valeur du processus et de l’expérience. Privilégier la situation sur l’action, c’est renouer d’une autre manière avec la présence. Les digital performances sont des théâtres du temps présent, le temps de la situation qui suppose l’implication de toutes les parties, le temps du processus qui a lieu, le temps du surgissement de la parole.

L’écriture propre aux digital performances place l’expérience du joueur, qu’il soit acteur (geste expert) ou spectateur (geste amateur), au centre du dispositif : écrire pour les digital performances et les drames interactifs, c’est avant tout écrire le joueur. Si représentation il y a, ce n’est ni de la réalité, ni d’un texte ou d’une action antérieurs au spectacle qui les rendrait à nouveau présent, mais du joueur dans le dispositif lui-même. Cette représentation prend en compte deux aspects : la représentation du joueur dans le système (par exemple la façon dont il apparaît : avatar, capture vidéo, texte…) et la représentation du joueur pour le système (par exemple, modélisation de ses actions/réactions afin que le système génère la suite de la fable). Ecrire le joueur, c’est non seulement lui donner un rôle à jouer, mais aussi définir les modalités de sa présence et du jeu. Autrement dit, dans les digital performances, la question de la représentation ne se pose pas par rapport à un texte ou à une réalité préexistants qu’il s’agirait de re-présenter, mais par rapport à la représentation du joueur dans le dispositif lui-même.





3. LES « THEATRES INTERACTIFS »

La narration interactive, communément appelée en anglais « Interactive Storytelling », a été et demeure très influencée par le théâtre, au point que l’on parle de cyberthéâtre (« cyberdrama ») ou encore de théâtre interactif (« interactive drama ») :

  • Cyberthéâtre est un terme inventé en 1997 par Janet Murray dans Hamlet on The Holodeck, livre qui a connu un large succès et est devenu une référence sur la narration interactive. D’après l’auteur, le « cyberthéâtre » est « une réinvention de la narration elle-même pour le nouveau médium numérique. » Ce terme est synonyme de narration interactive dans son emploi courant et a pour ambition de recouvrir tous les types de récits numériques, bien que Janet Murray mette l’accent sur les formes où le spectateur est impliqué.
  • « Théâtre interactif » est une expression employée par Brenda Laurel dans son ouvrage Computers as Theatre, publié en 1991. Elle a par la suite été adoptée par de nombreux chercheurs. Dans les théâtres interactifs, a priori aucune volonté de se rapprocher des écritures contemporaines, bien au contraire : le théâtre interactif repose sur une construction classique de la narration, avec début milieu et fin, intégrité fictive du personnage, recours à la mimesis et à ses stratégies d’identification, enchaînement logique des actions, etc. Sa principale caractéristique est de confier au spectateur l’interprétation de l’un des personnages principaux. Parler de « théâtre interactif » de préférence à « narration interactive » ou encore « fiction interactive », c’est mettre l’accent sur l’action, privilégier la première personne à la troisième, l’engagement à l’observation.

Ce champ est historiquement lié à la création des « bots » (un bot est un programme simulant un comportement humain) et autres personnages autonomes. Le théâtre interactif est en effet dans la lignée d’Eliza (un programme informatique créé en 1966 qui simulait un psychothérapeute et avec lequel on pouvait converser).



Démonstration de Eliza


Quel type d’expérience reposant sur ces personnages d’un nouveau genre peut-on concevoir ? Tel est l’enjeu du théâtre interactif, avec en ligne de mire la réalisation de jeux vidéo au récit plus élaboré, susceptible d’intéresser de nouveaux publics, en particulier les femmes.

Le théâtre interactif est confronté à un problème de taille : la participation du spectateur. Comment faire pour concilier la linéarité de l’action dramatique avec la liberté du spectateur ? Dans le théâtre interactif, la fable ne peut se dérouler sans l'intervention du spectateur. Mais celui-ci peut rompre son cours, aller dans une impasse, en pervertir le sens et finalement l'expérience engendre frustration et déception. Et pourtant, s'il n'y a pas intervention du spectateur, même à un niveau très basique (celui de la navigation, du choix du parcours par simple clic), on se retrouve avec une fiction de type cinématographique, télévisuelle ou romanesque mais en tout cas pas interactive.

Le théâtre interactif oscille entre deux pôles :

  • le respect d’une courbe dramatique
  • la participation du spectateur.

Ces deux tendances s’appuient sur deux corpus théoriques issus du théâtre et souvent considérés comme antinomiques, notamment en ce qui concerne le rapport texte/représentation ou encore l’arbitrage entre l’action et le personnage :

  • la fable aristotélicienne
  • l’improvisation.



3.1 Réminiscences aristotéliciennes

Dans Computers as Theatre, Brenda Laurel applique les principes énoncés dans La Poétique d’Aristote à la relation entre l’humain et l’ordinateur. Brenda Laurel a retenu Aristote, plutôt que des théoriciens du théâtre plus proches de nous dans le temps et dans l’esthétique : selon elle, il est le plus grand penseur de la forme dramatique et sa théorie a été la plus largement acceptée ; de plus, la théorie d’Aristote a l’avantage de présenter une structure logique et cohérente qui pourrait aisément être appliquée au monde des ordinateurs.

Brenda Laurel résume les six éléments qui composent la tragédie selon Aristote (histoire, personnage, pensée, expression, chant et spectacle) et en propose un équivalent informatique. Elle fait également intervenir un autre élément de La Poétique : l’action est unique et doit avoir un début, un milieu et une fin, soit une « courbe dramatique ». Ainsi, plutôt qu’un même enchaînement d’événements, il s’agira d’obtenir une courbe dramatique similaire d’une version (d’une représentation) à l’autre d’un même théâtre interactif.

La référence à La Poétique permet à Brenda Laurel de proposer un modèle d’élaboration de théâtre interactif basé sur l’action, plutôt que sur le personnage. La conception de l’action, sa cohérence et son unité sont au cœur de l’élaboration du programme. Une expérience esthétiquement réussie sera celle où le spectateur est engagé dans une suite d’événements cohérents, avec un début, un milieu et une fin. Ce schéma est pour Brenda Laurel une garantie d’émotions pour le spectateur. La principale conséquence de ce modèle centré sur l’action est la modélisation de l’auteur-metteur en scène : comme les histoires sont variables en fonction des actions du spectateur, il faut créer un programme chargé de gérer le déroulement et la cohérence de l’action principale, un équivalent de l’auteur-metteur en scène. À lui de recadrer l’action du spectateur dans une fable cohérente.

En fait, nous pourrions presque dire que toutes les expériences dans le domaine du théâtre interactif sont redevables à un degré plus ou moins grand de La Poétique. Ceci est dû non seulement aux réflexions théoriques que je viens de rappeler brièvement, à un arrière-plan culturel à la fois littéraire et cinématographique de facture classique, mais aussi au fait que Brenda Laurel a pu expérimenter ses théories dans l’une des toutes premières expériences de théâtre interactif, menée par le chercheur Josef Bates, The Oz Project. Ce projet est devenu une référence vis-à-vis de laquelle tous les projets ultérieurs de théâtre interactif sont amenés à se situer.

Voici la description de The Oz Project tel qu’il est envisagé dès l’origine :

« Vous êtes immergé dans un monde imaginaire avec des personnages passionnants et la possibilité de nombreuses aventures. Bien que vous contrôliez votre propre mise en scène en décidant de chacune de vos actions, vous êtes sûr que l’expérience sera réussie car un directeur de la narration interactive contrôle subtilement votre destin. L’expression “théâtre interactif” que nous utilisons signifie la présentation par des ordinateurs de mondes hautement interactifs, habités par des personnages dynamiques et complexes, où ont lieu des histoires plaisantes. On appelle interacteurs les gens qui interagissent avec ces mondes. » [18]

Directement influencés par les travaux de Josef Bates et les écrits de Brenda Laurel, deux jeunes chercheurs américains, Andrew Stern et Michael Mateas, créent Façade en 2005. Ce jeu est présenté par le New York Times comme le « futur des jeux vidéo » et par ses concepteurs comme le « premier théâtre interactif temps réel jamais réalisé ». Façade présente des personnages virtuels qui évoluent dans un univers en 3D. Dotés d’intelligence artificielle, ils réagissent en temps réel aux actions et aux dialogues effectués par le spectateur. Celui-ci intervient dans le théâtre interactif à la première personne, interprétant l’un des personnages du jeu, à savoir un ami intime d’un couple qui se déchire au cours d’une soirée. Prenant à parti le spectateur, l’homme et la femme lui demandent d’intervenir, ce qui modifiera irrémédiablement leur destin… jusqu’à la prochaine « représentation ».



Andrew Stern et Michael Mateas, Façade (2005)


Parmi les expériences dans ce domaine, il faut mentionner en France The Insider, projet non achevé mené par Jean-Noël Portugal à la fin des années 1990, et en Suisse les recherches de Nicolas Szilas. Ces deux projets sont étroitement liés, puisque Nicolas Szilas a contribué à la conception de l’architecture de The Insider. Le projet intitulé IDTension (Interactive Drama Tension) développé par ce dernier, sans remettre en question la progression dramatique, s’appuie davantage sur les théories narratives contemporaines que sur une analyse d’Aristote. Outre Bremond, Todorov, Propp, Nicolas Szilas cite volontiers Souriau et le schéma actanciel de Greimas. L’idée générale est de créer une architecture qui ne repose plus sur des unités d’action dirigées par un metteur en scène numérique, mais sur les éléments qui composent la narration. Il reprend à son compte le schéma actanciel de Greimas, qui décrit le récit selon les fonctions syntaxiques des actants, et non plus en termes d’évolution temporelle. Nicolas Szilas met également au cœur de son architecture la notion de conflit, moteur de l’action des personnages. À partir de cette analyse, il construit un système composé de cinq grands modules : le monde de l’histoire, la logique narrative, le séquenceur narratif, la modélisation du spectateur et le théâtre. Cette dernière dénomination n’est pas fortuite, même si le terme « scène » aurait été plus approprié.



3.2 Improviser

Si les influences aristotéliciennes dominent le monde du théâtre interactif, d’autres voies théâtrales sont également empruntées. Il s’agit de tentatives et de propositions qui reposent sur l’improvisation entre des personnages autonomes. La fable n’est pas dirigée par un auteur numérique mais « émerge » des relations établies entre les personnages numériques. On parle de comportement émergent, voire de narration émergente, pour qualifier ce type de phénomène. Ce n’est donc plus l’histoire qui est au sommet des relations causales entre les différents éléments de la pièce, comme dans le modèle aristotélicien proposé par Brenda Laurel, mais le personnage.

Les travaux de Barbara Hayes-Roth à l’université de Standford dans les années 1990 sont représentatifs de cette approche. The Virtual Theatre Project

« a pour objectif de créer un environnement multimédia dans lequel les utilisateurs peuvent jouer tous les rôles liés à la production et à la représentation de pièces de théâtre dans une compagnie théâtrale dont le jeu est basé sur l’improvisation » [19] .

Deux éléments importants changent par rapport aux projets évoqués précédemment :

  • les références théâtrales : il ne s’agit plus de se fonder sur Aristote et sa vulgate, mais sur l’improvisation dirigée, c’est-à-dire sur une forme d’improvisation basée sur un canevas et des consignes données aux acteurs.
  • le rôle du spectateur : il peut non seulement être acteur et assumer un rôle, mais on l’envisage aussi dans tous les autres métiers du théâtre (metteur en scène, écrivain, scénographe…).

Barbara Hayes-Roth et son équipe ne sont pas tant intéressées par le récit des événements que par la façon dont ils ont lieu. Autrement dit : en quoi la personnalité des personnages peut-elle faire varier la représentation ? [20]

On ne demande pas au système d’ajuster le cours de l’action en fonction des actions précédentes du spectateur et d’une courbe dramatique : l’histoire est déjà définie. Ce qu’on demande au système, c’est d’adapter cette histoire à la personnalité des personnages, personnalité définie selon un système de valeurs. Au spectateur de paramétrer ces valeurs avant de « lancer » les personnages.



3.3 Des personnages crédibles

Pour qu’un spectateur engage une relation avec un personnage numérique, il faut que ce dernier soit « crédible ». Ce terme revient fréquemment sous la plume des concepteurs de personnages autonomes et de théâtres interactifs, et a donné lieu au développement de la recherche sur les « believable characters » (que l’on peut traduire par personnages crédibles ou vraisemblables), dont le Virtual Theater Project est exemplaire. La « crédibilité » incite à créer des personnages conduits par leur personnalité et leurs émotions. Du reste, aujourd’hui, ce concept ne se limite pas à la réalisation de personnages numériques, mais embrasse tout le champ des technologies numériques et de leurs applications, du site Internet au téléphone portable : la crédibilité est devenue un enjeu économique car elle est un facteur de persuasion du spectateur. Des études ont montré que les informations ou services perçus comme non crédibles étaient rejetés par les consommateurs. B.J Fogg, directeur du Persuasive Technology Lab à l’Université de Stanford (où travaille également Barbara Hayes-Roth) développe cette approche dans son ouvrage Persuasive Technology: Using Computers to Change What We Think and Do, publié en 2002. L’un des chapitres est intitulé Credibility and Computers. Son axe de recherche est la « captologie » (captology), science de la persuasion appliquée au multimédia.

Le concept de crédibilité évoqué est très flou. Il rejoint sur bien des points celui de vraisemblance, introduit par Aristote et développé par les théoriciens du théâtre classique. Le vraisemblable a partie liée avec la mimesis et avec le personnage. Bien que le vraisemblable se distingue du réalisme, ils ont souvent été confondus, amalgamés. On observe le même phénomène à propos de la crédibilité : crédibilité, réalisme et identification sont souvent associés dans les applications informatiques, en particulier dans le domaine du jeu vidéo, alors que rien ne les y oblige.



3.4 Augusto Boal

Depuis le début des années 2000, une nouvelle référence fait des émules, dans le but assumé de remettre en cause le schéma aristotélicien dominant : le Théâtre de l’opprimé du metteur en scène et écrivain d’origine brésilienne Augusto Boal. Cette référence est citée par un chercheur, Gonzalo Frasca. Le sujet des recherches de Gonzalo Frasca est le jeu vidéo, mais d’un point de vue bien particulier, comme le montrent les questions qui résument sa problématique :

« Est-il possible de concevoir des jeux vidéos traitant de problèmes politiques et sociaux ? Les jeux vidéo peuvent-ils être un outil qui développe la pensée critique ? Les jeux vidéo sont-ils une alternative pour comprendre la réalité ? » [21] .

Pour créer des jeux vidéo qui correspondent à de tels critères, Gonzalo Frasca suggère de se débarrasser des références aristotéliciennes remises au goût du jour par Brenda Laurel et Janet Murray, et de se tourner vers d’autres théories de la représentation, en particulier celle d’Augusto Boal. Dans la lignée de Brecht et de sa remise en cause des principes aristotéliciens, Boal propose, dans le « théâtre invisible » et dans le « théâtre forum », d’explorer les règles du jeu de situations politiques et sociales en impliquant le spectateur dans cette exploration :

  • Dans le « théâtre invisible », des acteurs jouent des situations provocatrices dans les lieux publics, comme s’il s’agissait de situations réelles, afin de susciter une réaction des passants, qui deviennent ainsi les protagonistes d’un drame sans le savoir.
  • Dans le « théâtre forum », les spectateurs sont conscients de jouer un personnage : interprétant des situations quotidiennes, souvent liées au thème de l’oppression, il s’agit de susciter prise de conscience et réflexion chez les spectateurs-acteurs.

Pour Gonzalo Frasca, Augusto Boal est un modèle qui peut servir à la création de jeux vidéo non aristotéliciens et non immersifs. L’objet du théâtre interactif est alors ce que Gonzalo Frasca nomme « l’exposition des règles », et non plus le récit. Explorer les règles du jeu : tel est l’enjeu de ces jeux vidéo, tout comme il est l’enjeu des écritures scéniques contemporaines qui reposent sur une situation et non plus sur une fable. La mimesis et son cortège (vraisemblance, identification, catharsis…) n’est pas le seul modèle. Outre l’improvisation ou encore le propos d’Augusto Boal, d’autres modèles théâtraux questionnant la posture du spectateur, de l’immersion à la mise à distance, avec toutes les nuances de l’une à l’autre, devraient être interrogés : le théâtre abstrait de Schlemmer et du Bauhaus ; la sur-marionnette de Craig, théoricien et metteur en scène anglais qui souhaitait au début du XXe siècle débarrasser le théâtre du réalisme, à la fois dans le décor et dans le jeu de l’acteur ; le « théâtre de la cruauté » d’Artaud, qui proposait d’immerger le spectateur dans la représentation.




Références :

Bootz Philippe, La littérature numérique, Leonardo/Olats, coll. Les basiques

Laurel Brenda, Computers as Theatre, 1991, Reading, MA : Addison-Wesley (édition revue et augmentée, 1993).

Lehmann Hans-Thies, Le Théâtre postdramatique, Paris : L’Arche, 2002.

Lévy Pierre, De La Programmation considérée comme l'un des Beaux-Arts, Paris, La Découverte / Textes à l’appui (coll. Anthropologie des sciences et des techniques), p. 58, 1992.

Manovich Lev, The Language of New Media, Cambridge (MA) : The MIT Press, 2001 – traduction française éditée aux Presses du réel, 2010.

Ryngaert Jean-Pierre et Martinez Ariane, Graphies en scène, Montreuil-sous-Bois : Editions théâtrales, 2011.

Wardrip-Fruin Noah, Harrigan Pat (sous la direction de), First Person : new media as story, performance, and game, Cambridge (MA) : The MIT Press, 2004.





Sommaire

  • Que sont les « digital performances » ?

  • Quels sont les antécédents historiques des digital performances ?

  • Quelles sont les premières digital performances ? (années 1960)

  • Quels sont les espaces scéniques des digital performances ?

  • Qu’implique l’interactivité pour l’interprète et pour le spectateur ?

  • Les digital performances vont-elle entraîner la disparition de l’acteur et du danseur ?

  • Quels sont les types d’écriture (scénique et textuelle) à l’œuvre dans les digital performances ?

  • Quels modes de collaboration entre artistes et ingénieurs ?

  • Comment documenter les digital performances ?

  • Quelles sont les technologies mises en œuvre ?

  • Festivals, lieux de création et de diffusion

  • Bibliographie




    Notes :


    1 Lévy Pierre, De La Programmation considérée comme l'un des Beaux-Arts, Paris : La Découverte / Textes à l’appui (coll. Anthropologie des sciences et des techniques), 1992, p. 58.

    2 Manovich Lev, The Language of New Media, Cambridge, MA : MIT Press, 2001, p. 219. Traduction de l’auteur.

    3 Dumb Type, cit. in Olivier Schmitt, « Festival Exit 95, carrefour mondial de la création scénique », in Le Monde, 11 mai 1995.

    4 À ce sujet, cf Ryngart Jean-Pierre et Martinez Ariane (sous la direction de), Graphies en scène, Montreuil : Éditions THÉÂTRALES, 2011.

    5 Fourny Pierre/ Alis, La Langue coupée en 2, Paris : La Sterne Voyageuse éditeur / Alis, 2003, livre accompagné d’un CD-ROM ; Fourny Pierre, La Poésie à 2 mi-mots, Paris : Alis, 2000, livre accompagné d’un CD-ROM

    6 Fourny Pierre, La Poésie à 2 mi-mots, , Paris : Alis, 2000, pp. 3-4.

    7 eMotion, publié sur http://www.am-cb.net, consulté le 9/10/2012.

    8 Bootz Philippe, « La Littérature animée programmée : du mixage des sens à une réévaluation de la lecture », in actes du colloque Intersens, Laboratoire Musique et Informatique de Marseille (MIM), déc. 2000, http://www.labo-mim.org

    9 Dictionnaire des arts médiatiques, http://132.208.74.10/

    10 Article reproduit dans de nombreux ouvrages sur les nouveaux médias. Des extraits sont traduits en français in Bureaud Annick et Magnan Nathalie (textes réunis et présentés par), Connexions. Art, réseaux, médias, Paris : École Nationale Supérieure des Beaux-Arts, 2002, pp. 352-360.

    11 Anderson Laurie, in Programme de la 9e Biennale de l'Image en mouvement, Centre pour l'image contemporaine, Genève, 2-10 novembre 2001.

    12 La Fura dels Baus, El Teatro Digital, traduction de l’auteur. http://www.lafura.com

    13 Verde Giacomo, « Strada-Internet », in Anomalie Digital_arts, « Digital Performance », n° 2, janv. 2002, p. 374.

    14 Cauquelin Anne, Le site et le paysage, Paris : PUF/Quadrige, 2002, p. 11.

    15 Gourfink Myriam, This is my House, 2005, programme de salle.

    16 Fouilhoux Biliana, « Le surgissement créateur dans le processus de création chorégraphique. Improvisation entre prévisible et imprévisible », in Le surgissement créateur : jeu, hasard et inconscient, Paris : Édition Universitaire de la Sorbonne Paris V, p. 114.

    17 Lehmann Hans-Thies, Le Théâtre postdramatique, Paris : L’Arche, 2002, p. 104.

    18 Kelso Margaret Thomas, Weyhrauch Peter, et Bates Joseph, Dramatic Presence, School of Computer Science, Carnegie Mellon University, 1992. Traduction de l’auteur.

    19 The Virtual Theatre Project, http://www.ksl.Stanford.EDU/projects/cait/playbill.html Traduction de l’auteur.

    20 Voir également les travaux menés par Clark Elliott dans les années 1990 à l'Université DePaul (Chicago) : http://condor.depaul.edu/~elliott/papers/aa98/oct.html

    21 Frasca Gonzalo, « Videogames of the Oppressed », in Wardrip-Fruin Noah et Harrigan Pat (sous la direction de), First Person : new media as story, performance, and game, Cambridge (MA) : The MIT Press, 2004.



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